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Henri II

Henri II. est un roi de France, né le 31 mars 1519, mort le 10 juillet 1559. Il n'était que le second des trois fils de François Ier et de sa première femme, Claude de France; il ne semblait donc pas appelé à régner, lorsque la fin prématurée de son frère aîné, le dauphin François (1536), fit de lui l'héritier présomptif de la couronne. Cette même année, qui l'avait appelé à de si hautes destinées, il devint l'amant de Diane de Poitiers, et pour qui connaissait l'ambition et la ténacité de la dame, ainsi que l'indolence naturelle du prince, on pouvait saluer d'avance en elle la reine de demain; d'avance aussi la dauphine, Catherine de Médicis, femme de Henri depuis le mois de novembre 1533, était promise aux vains honneurs de son rang sans le moindre crédit effectif.
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Henri II.
Henri II, par François Clouet (XVIe s.)

Dans sa curieuse et piquante préface aux Lettres de Dianne de Poytiers, G. Guiffrey a excellemment dépeint la singulière organisation du ménage à trois, - mari, épouse et maîtresse, - qui s'assit sous le dais royal en 1547, au décès de François Ier, le parfait accord régnant entre Catherine et Diane, les bons offices (les plus intimes compris) que celle-ci rendait à celle-là et qui lui étaient payés en marques publiques de considération. Ces détails d'alcôve ont une portée plus générale qu'il y paraît d'abord : ils expliquent le règne entier.

Le premier personnage honoré à l'avènement de Henri Il fut, il est vrai, Anne de Montmorency, ami personnel du roi; encore l'était-il tout autant de la favorite, puisque la cause de sa disgrâce, en 1541, avait été son opposition aux volontés de Mme d'Etampes, maîtresse de François ler, la hautaine rivale, aujourd'hui abaissée, de la maîtresse du dauphin d'alors. Mais l'influence de Diane se lit mieux encore dans la faveur dont jouirent, conjointement avec Montmorency, les princes de la maison de Guise, inféodés à sa fortune par le mariage de l'un d'eux, le duc d'Aumale, avec sa fille Louise de Brezé. La lutte d'influence des familles de Montmorency et de Guise ne cessera qu'avec le règne. En la personne de leurs chefs respectifs, c'est le dévouement et l'impéritie qui entrent en lice avec l'ambition égoïste et le talent; déjà dans l'âme du duc François de Guise couvaient ces rêves obscurs de grandeur qui devaient prendre un essor éphémère sous le successeur de Henri Il et conduire par la suite son fils aux sanglantes saturnales de la Ligue.

Nonobstant ces tiraillements intérieurs, qui divisaient la cour en deux camps, le règne de Henri II fut assez prospère, surtout à l'extérieur. La prise de Boulogne sur l'Angleterre (1549), de Metz, Toul et Verdun sur l'Empire (1552), la vaine tentative de Charles-Quint pour reprendre la première de ces places, la victoire de Renti (13 août 1554) l'inaugurèrent brillamment. Les revers des troupes françaises en Italie étaient de pauvres palliatifs pour l'orgueil de l'ennemi. La défense de Sienne par Montluc, aussi superbe de vaillance que celle, plus heureuse, de Metz par Guise, illustra les armes françaises plus que ne l'aurait fait un grand succès. Le 5 février 1556, un armistice de cinq ans fut signée à Vaucelles entre Henri II et Charles-Quint, alors sur le point d'abdiquer le diadème impérial au profit de son frère, l'archiduc Ferdinand, et la couronne d'Espagne au profit de son fils, l'infant don Philippe (Philippe II). 
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Monument de Henri II et de catherine de Médicis, à la basilique Saint-Denis.
Gisant d'Henri II.
Monument et les gisants d'Henri II et de Catherine de Médicis (basilique Saint-Denis).
© Photos : Serge Jodra, 2011.

Mais, dès année suivante, la trêve fut rompue, à la suggestion du duc de Guise, qui dans la suspension des hostilités voyait un terme à son crédit, uniquement fondé sur la guerre. Tandis qu'il faisait une pointe hardie dans le Sud de l'Italie, pour faire valoir ses prétentions à lui plutôt que celles du roi sur le royaume de Naples, le duc Emmanuel-Philibert de Savoie, commandant en chef des forces espagnoles de Flandre, envahissait la Picardie et assiégeait Saint-Quentin, où s'était jeté l'amiral de Coligny avec une poignée d'hommes. Le connétable de Montmorency marcha au secours de la place et ne réussit qu'à se faire battre. Lui-même fut fait prisonnier avec l'élite de la noblesse française (10 août 1557). 

Sans la faute que commit le roi d'Espagne en ordonnant de réduire Saint-Quentin avant de passer à toute autre opération, sans l'énergie de l'amiral qui, en tenant vingt jours derrière des remparts en ruine, laissa le temps au pays de s'armer, au duc de Guise de repasser les Alpes, Paris était terriblement menacé. L'arrivée de Guise rétablit les affaires de Henri Il. La reprise de Calais, de Guines, de Ham sur les Anglais, alliés des Espagnols, fut la compensation de l'humiliation de Saint-Quentin. Cependant la défaite du maréchal de Termes à Gravelines (13 juillet 1558) faillit remettre les choses en l'état. Ce retour apparent de la mauvaise fortune et un peu aussi la douleur de voir prisonnier son vieil ami le connétable déterminèrent Henri Il à proposer la paix à Philippe II. Les préliminaires en furent signés le 3 avril 1559 au Cateau-Cambrésis. Un mécontentement général éclata en France quand on en connut les clauses. Le duc de Guise s'en fit le porte-voix. Il dit hardiment au roi : 

« Sire, quand vous ne feriez que perdre pendant vingt ans, vous ne sauriez perdre ce que vous voulez donner en un coup. » 
Ayant tout à gagner et rien à perdre à la continuation des hostilités, les gens de guerre jouaient leur rôle en formulant cette assertion. L'opinion eut le tort de l'admettre, et la postérité le tort plus grand de la faire sienne, et même de l'exagérer encore, de crier à la trahison. Le roi gardait, au demeurant, presque toutes les conquêtes utiles de son règne, et, en renonçant à ses droits, plus ou moins hypothétiques, sur le royaume de Naples et le duché de Milan, il s'interdisait réellement pour lui et ses successeurs ces lointaines expéditions par delà les monts, où, depuis Charles VIII, s'engloutissaient sans résultats appréciables le sang et l'or de la France. La lecture du livre consacré par Ruble au Traité du Cateau-Cambrésis prouvera au plus déterminé détracteur de la politique extérieure de Henri II que, le jour où il ratifia les décisions de ses plénipotentiaires, il fit, par hasard, sans doute, par complaisance pour les intérêts des Montmorency, mais fit, en définitive, oeuvre d'homme d'Etat avisé.

Il s'en faut que sa conduite à l'intérieur mérite les mêmes éloges. Le désordre des finances, accru par les dépenses de l'entretien de l'armée d'Italie et par les dilapidations de Diane de Poitiers, était à son comble. Il y eut pour raisons fiscales plusieurs émeutes qu'il fallut réprimer sévèrement; telle, au debut du règne, l'insurrection communaliste de Bordeaux (1548). Sous un autre rapport, les actes du roi furent encore plus condamnables. Ainsi de ses sévices contre le protestantisme qui, pour l'obstination dans la barbarie, laissèrent loin derrière elles les persécutions de son père. Tout au plus peut-on objecter, à la décharge de tous deux, qu'ils étaient de leur temps, et que, en ce qui concernait Henri Il particulièrement, tout son entourage l'y poussait, aussi bien sa très dévote maîtresse que ses fidèles Montmorency et les Guises. Son dernier acte de souverain fut l'arrestation, en plein Parlement, de cinq conseillers, dont Dufaur de Pibrac et Anne Dubourg, soupçonnés d'hérésie pour s'être fait les défenseurs de la liberté de conscience. Parlant du plus compromis, Anne du Bourg, il s'écria, dit-on : 

« - Je le verrai brûler de mes yeux! »
Il comptait sans la fatalité. Tandis que le procès s'instruisait, dans une joute donnée en l'honneur du double mariage de sa fille Elisabeth avec le roi d'Espagne et de sa soeur Marguerite avec le duc de Savoie, stipulé par le récent traité, il fut accidentellement blessé à l'oeil par son partenaire, le comte de Montgomery (29 juin). Douze jours après, il expirait.
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Mort de Henri II, au cours d'un tournoi.
Le tournoi à la suite duquel mourut Henri II.

De son union avec Catherine de Médicis, il laissait sept enfants vivants : Elisabeth, reine d'Espagne; Claude, duchesse de Lorraine; François, qui fut François II; Charles-Maximilien, qui fut Charles IX; Edouard-Alexandre-Henri, qui fut Henri III; Marguerite, qui devint reine de Navarre en 1572; François, duc d'Alençon et d'Anjou, mort sans alliance en 1584. (Léon Marlet).

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Dictionnaire biographique
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