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Maison de Habsbourg

La maison de Habsbourg fut une des principales familles à avoir régné en Europe, où elle joua un rôle prépondérant au XVIe et au XVIIe siècle. Elle s'est éteinte au XVIIIe. La généalogie authentique et complète des Habsbourg ne se suit que jusqu'à Albert le Riche en 1153. Mais on peut remonter pour la recherche de ses origines jusqu'au Xe siècle, à l'époque d'Otton le Grand. C'était une famille de la Souabe méridionale, établie sur les bords de l'Aar et de la Reuss. On a tenté de la rattacher aux anciens ducs de Lorraine, mais c'est une hypothèse dénuée de preuves. Les premiers ancêtres connus sont le comte Gontran (Guntranm) et son fils Conrad, établis dans le château d'Altenburg, au temps d'Otton le Grand. C'étaient des personnages énergiques qui étendirent leur ascendant sur une grande partie de l'Argovie, donnant ou imposant leur protection aux faibles, les dépouillant de leur liberté. Il faut citer ensuite Werner, évêque de Strasbourg (1001-1029) et son frère ou beau-frère Radbod, fils d'un comte d'Altenburg du nom de Kanzelin ou Conrad.  Werner joua un grand rôle dans les affaires allemandes au temps de Henri Il et de Conrad II. Il fut le fondateur du couvent de Muri (1027) et bâtit auprès le château de Habsbourg, dont les seigneurs furent les avoués héréditaires du couvent. Les comtes Kanzelin et Radbod combattirent avec Ernest de Souabe contre Henri Il. 

Quoique Radbod eût des frères, ses descendants recueillirent l'héritage entier de la famille qui prit le nom de son nouveau château de Habsbourg; le nom primitif d'Altenburg fut abandonné. Le premier acte officiel où paraisse le nom des Habsbourg est daté du 11 octobre 1064. C'est un diplôme par lequel un comte Werner de Habsbourg (neveu de l'évêque de Strasbourg et apparemment fils de Radbod), à l'occasion de la consécration du couvent de Muri par l'évêque de Constance, Rumolt, confirme les donations et fondations faites par ses prédécesseurs. Ce comte Werner embrassa le parti de l'anticésar Rodolphe de Souabe contre Henri IV, mais ne paraît pas avoir eu à en pâtir. Le premier des Habsbourg qui ait joué un grand rôle, le fondateur de la puissance de la famille, fut Albert III le Riche, fils du comte Werner II.

La fortune des Habsbourg fut due à la protection des Hohenstaufen, leurs voisins, auxquels ils s'attachèrent. Albert le Riche fut comblé de faveurs par Frédéric Barberousse. Il reçut le landgraviat d'Alsace à l'extinction de la famille des comtes d'Egisheim, le comté de Zurich, l'avouerie des couvents de Seckingen et de Murbach. Son fils, Rodolphe l'Ancien (1199-1232), fut pourtant un partisan d'Otton IV; c'était déjà un des plus grands seigneurs de la Souabe. Il se fabriqua une généalogie qui le rattachait au comte Liutfried, bienfaiteur de l'abbaye de Saint-Trudpert (Forêt-Noire) au Xe siècle, et par celui-ci aux Etichons, ducs d'Alsace au VIIIe siècle. Plus tard d'autres généalogistes rattachèrent les Habsbourg à la famille romaine des Pierleoni, celle du pape Anaclet (XIIe siècle) et par ceux-ci à la gens romaine des Anicii ou même aux Scipions (oubliant la filiation juive des Pierleoni). Néanmoins la première version prévalut et à partir de Maximilien Ier elle devint officielle; on échafauda des combinaisons généalogiques, associant les Habsbourg à la maison de Zaehringen et à celle de Lorraine. Elles furent portées à leur perfection par Herrgott (mort en 1762), tandis que les moines de Muri, Kopp et Wieland s'en tenaient à la descendance de Gontran, qui paraît vraisemblable.

A la mort de Rodolphe l'Ancien, les deux fils qu'il avait eus d'Agnès de Staufen, Albert et Rodolphe, se partagèrent ses possessions après une querelle terminée en 1238 par un jugement arbitral. L'aîné, Albert le Sage, garda le primitif château de Habsbourg, les terres d'Argovie, de Zurich, du Sundgau et Brisgau, l'avouerie de Muri, Seckingen, Bremgarten, Maienberg, Brugg, etc. Le cadet, Rodolphe, reçut les terres de Schwytz, Sarnen, Stanz, Buochs, Sempach, Willisau, Meggenhorn, Ramefluh, ou il bâtit un nouveau château de Habsbourg, Laufenburg et la moitié de Limberg. Le landgraviat d'Alsace resta indivis entre les deux frères. Ceux-ci devinrent les fondateurs de deux lignées : la lignée Albertine ou de Habsbourg, et la lignée Rodolphine ou de Laufenburg. Albert et ses descendants prirent parti pour les Gibelins, Rodolphe et les siens pour les Guelfes. Leur fortune fut très inégale. 

Albert le Sage eut de son mariage avec Heilwig, fille du comte Ulrich de Kyburg, trois fils : les deux cadets, Albert et Hartmann, moururent jeunes; mais l'aîné, Rodolphe (né le 1er mai 1218), devint empereur (Rodolphe de Habsbourg). N'oublions pas de citer leur soeur Elisabeth, mariée au burgrave de Nuremberg Frédéric de Hohenzolern. Avant de suivre plus loin les destinées de la famille impériale de Habsbourg, il nous faut terminer l'histoire de la branche cadette ou de Laufenburg. Confinée dans ses possessions héréditaires, surtout autour de Laufenburg et Waldshut, elle eut un rôle très effacé. Elle perdit dès l'avènement de Rodolphe de Habsbourg au trône impérial sa part du landgraviat d'Alsace; au milieu du XIVe siècle, la branche aînée lui enleva les possessions des cantons forestiers de la Suisse centrale et notamment la ville de Rapperswyl (1359); cependant elle put conserver le landgraviat de Klettgau. Elle se subdivisa en deux lignes, dont la première s'éteignit en 1408 avec le comte Jean IV, et la seconde en 1415 avec le comte Egno. Ursule, fille de Jean IV, porta le landgraviat de Klettgau aux comtes de Sulz, des mains de qui il passa aux Schwarzenberg. Le reste des terres de la maison de Habsbourg-Laufenburg fut annexé par les Suisses.

La branche aînée des Habsbourg devint à partir de Rodolphe la maison d'Autriche. Elle avait accru ses possessions de Souabe par l'héritage de la maison de Kyburg (Bade, Kyburg, Winterthur, Frauenfeld, Dissenhofen, landgraviat de Thurgovie), mais Rodolphe ne put réussir à acquérir le duché de Souabe vacant par l'extinction des Hohenstaufen. L'opposition des comtes palatins du Rhin et des comtes de Württemberg fit échouer ce projet, et le centre de gravité de la principauté habsbourgienne fut reporté vers ses nouvelles acquisitions des rives du Danube (Autriche), où l'attendait un plus brillant avenir que dans son domaine primitif. Celui-ci fut en grande partie perdu à la suite des guerres soutenues contre les montagnards suisses de la fin du XIIIe à la fin du XVe siècle. 

A la suite des désastres de Sempach et Naefels (1386 et 1388), la Suisse centrale fut perdue (Rothenburg, Sempach, Niederurnen, Nidau, Buren, Unterseen, Bucheck); la mise au ban de l'Empire de Frédéric à la Bourse vide au temps du concile de Constance entraîna la perte de l'Argovie (Bade, comté de Kyburg, Schaffhouse, Waldshut, Seckingen, etc.). Puis Raperswyl fit défection, et l'empereur Frédéric III, malgré l'appui des ducs de Bourgogne, dut reculer encore. Sargans, la Thurgovie furent perdus, Winterthur vendu, si bien que le duc Sigismond, par la médiation de Louis XI, conclut avec les confédérés un pacte, dit Eurze Richtung, aux termes duquel il renonçait à tout ce qu'ils avaient enlevé à la maison de Habsbourg. Le centre de la maison avait été transféré du château de Habsbourg à Bade (Argovie) après l'annexion du comté de Kyburg, puis à Vienne.

L'histoire des Habsbourg de la branche principale se confond avec celle de l'Autriche à partir de Rodolphe de Habsbourg. Nous nous bornerons ici à rappeler ici les faits essentiels. Rodolphe, empereur (1273-1291), enleva à Ottokar l'Autriche, la Styrie, la Carniole qu'il donna à son fils Albert. Celui-ci ne devint empereur (1298-1308) qu'à la mort d'Adolphe de Nassau et tenta vainement d'acquérir la Hollande, la Zélande, la Thuringe. Frédéric le Beau, fils d'Albert, ne put se maintenir sur le trône impérial; mais les Habsbourg, momentanément éclipsés par la maison de Luxembourg, continuèrent leur extension territoriale; Albert II, troisième fils d'Albert ler, acquit la Carinthie (1336); Rodolphe IV, fils d'Albert II, y ajouta le Tyrol (1364). A la mort de celui-ci (1365), les Habsbourg possédaient plus de 90 000 km². Ces domaines furent partagés entre la branche autrichienne et la branche styrienne.

La branche autrichienne (on l'appelle aussi branche Albertine), issue d'Albert V, acquit la Hongrie et la Bohème et remonta sur le trône impérial désormais héréditaire pendant trois siècles dans la famille de Habsbourg, mais elle s'éteignit avec Vladislav le Posthume dès 1457.

La branche styrienne (on l'appelle aussi branche Léopoldine), fondée par Léopold III, acquit Fribourg-en-Brisgau (1369), Feldkrich (1375); se subdivisa en 1406 en branche styrienne proprement dite et branche tyrolienne; Ernest, fils de Léopold III, fonda la première; son frère, Frédéric IV à la Bourse vide, la seconde. Le fils d'Ernest fut Frédéric V; le fils de Frédéric IV fut Sigismond, qui mourut sans enfants, de sorte que la branche styrienne subsista seule. Frédéric V, devenu empereur sous le nom de Frédéric III (1440-1493), réunit tous les domaines des Habsbourg, l'Autriche en 1457, le Tyrol en 1490. Il prépara la splendeur de sa maison par le mariage de son fils Maximilien avec l'héritière de la maison de Bourgogne (1477). Ce faible prince avait une telle confiance en l'avenir qu'il inscrivait partout la devise A E I O U ( = Austriae erit imperium orbis universi). Maximilien Ier (1493-1519) recueillit cet héritage et acheva de préparer la grandeur des Habsbourg par le mariage de son fils Philippe le Beau avec Jeanne, héritière de l'Aragon et de la Castille (1496). Les deux enfants issus de cette union, Charles et Ferdinand, furent la souche des Habsbourg d'Espagne et des Habsbourg d'Autriche. Charles-Quint céda en effet à son cadet les Etats autrichiens auxquels Ferdinand ajouta la Bohème et l'Autriche. Le partage devint définitif en 1556, à l'abdication de Charles-Quint, la branche autrichienne reprenant possession de l'Empire. La branche espagnole représentée par Philippe II (1556-98), Philippe III (1598-16621), Philippe IV (1621-1665) et Charles II (1665-1700), s'éteignit avec ce dernier le 1er novembre 1700, du moins dans la ligne masculine. De son héritage, la branche autrichienne reçut les Pays-Bas, Milan, Naples et la Sicile.

La branche autrichienne se subdivisa à la mort de Ferdinand Ier; Maximilien Il (1564-1576) eut, avec l'Autriche, la Bohème et la Hongrie; Ferdinand, le Tyrol; Charles, la Styrie, Carinthie et Carniole. La lignée tyrolienne s'éteignit la première avec son fondateur (1595) et l'héritage passa à celle de Styrie; celle-ci recueillit également l'Empire et les couronnes de la lignée autrichienne après la mort des deux fils de Maximilien Il, Rodolphe II (1576-1642) et Matthias (1612-1619). Ferdinand, fils de Charles de Styrie, devint empereur sous le nom de Ferdinand Il; il aurait réuni toutes les possessions habsbourgeoises s'il n'eût laissé le Tyrol à son frère Léopold; cette nouvelle branche tyrolienne ne dura que quarante ans (1625-1665). La branche des Habsbourg d'Autriche représentée par Ferdinand IIl (1619-1637), Ferdinand III (1637-57), Léopold Ier (1658-1705), Joseph Ier (1705-1711), Charles VI (1711-1740) , s'éteignit avec ce dernier le 20 octobre 1740. 

N'ayant pas d'enfants mâles, il avait fait des efforts désespérer pour assurer sa succession à sa fille Marie-Thérèse. Elle la recueillit en effet et la porta avec l'Empire à son mari François Ier et à son fils Joseph II, fondateurs de la maison de Lorraine-Autriche, qu'on appelle souvent Habsbourg-Lorraine et qu'on regarde comme continuant la vieille dynastie des Habsbourg. (A.-M. B.).

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