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Giordano

Luca Giordano est un peintre, né à Naples en 1632, et mort à Naples en 1705. Son père, Antonio, était à la fois copiste et marchand de tableaux : dans la maison paternelle l'enfant apprit, avec une technique superficielle, l'art de l'imitation et les profits du plagiat. L'effet de ces premiers exemples ne put être effacé par les leçons que Luca reçut d'un grand artiste, fixé à Naples depuis quelque temps et voisin de son père, José Ribera. Il entra dans l'atelier du maître à sept ans, si l'on en croit le biographe napolitain Dominici, et y resta neuf ans. Ses progrès furent rapides, et il acquit d'abord une vigueur de touche dont il reste un exemple, malheureusement isolé, dans son tableau des Forgerons; mais d'autres modèles lui firent promptement perdre ces qualités. Un jour, à l'improviste, il quitta Naples et gagna Rome, où il s'en vint droit au maître en vogue, Pietro da Cortona; passer de son premier maître, sombre et farouche,  à ce décorateur emphatique et souriant qui s'efforçait de combiner la pompe et la grâce, le contraste était grand : mais le jeune homme s'assimila cette seconde manière aussi aisément que la première. 

Son père, apaisé par ses succès, lui permit de rester trois ans chez Pietro da Cortona, puis il l'emmena avec lui à Parme, à Venise, à Florence, où partout Luca copiait, avec une facilité prodigieuse, les oeuvres les plus différentes. Aussi, de retour à Naples, le père associa-t-il son fils à son commerce, en lui faisant exécuter nombre de toiles qu'il vendait ensuite pour des originaux de Titien, de Véronèse, ou même, ce qui semble incroyable, de Dürer. En même temps Luca satisfaisait à toutes les commandes que lui faisaient le vice-roi de Naples, les fabriques, les congrégations. On cite un Saint François-Xavier dans l'Inde (maître-autel du Gesù), peint en trois jours, avec l'Histoire de Judith et le Serpent d'airain (trésor de San Martino), peints en deux jours. De ces tableaux chacun, comme par gageure, est un pastiche d'un maître différent. Cette habileté frappa d'étonnement les contemporains et valurent à Luca les surnoms de Fa presto, il Proteo della Pittura, il Fulmine di Pittura

En 1679, il fut appelé à Florence, où il peignit la coupole de la chapelle Corsini, au Carmine; il y revint en 1682 pour décorer la bibliothèque du palais Ricardi, où il groupa des allégories bizarres autour de Cosme III et de sa famille. Enfin, en 1692, un seigneur espagnol qui vivait en Sicile le signala à l'attention du roi Charles II. Celui-ci s'empressa d'appeler l'artiste qui arriva avec toute une suite et un train de seigneur. Il fut reçu magnifiquement et prit la place du pintor da Camara, reste de la grande école disparue, Claudio Coello. Aussitôt il se mit à l'oeuvre, et pendant deux ans il couvrit l'église de l'Escurial et le grand escalier du palais de compositions colossales. Il décora encore le palais du Buen Retiro, la cathédrale de Tolède, les églises Nuestra Señora de Atocha et San Antonio de los Portugueses, etc. A la mort de Charles II (1700), Philippe V, occupé par la guerre qu'avait provoquée son avènement, négligea le peintre tout en le gardant à son service. Aussi Luca, qui était alors un vieillard, quitta-t-il l'Espagne pour revenir mourir à Naples, laissant à ses fils et à ses filles une fortune princière.

Il avait rempli l'Europe de ses productions hâtives. On en compte 57 à Madrid, 12 à Naples, 10 à Dresde, 13 au Belvédère de Vienne et 3 au Louvre : la Présentation au Temple, les Anges présentant à l'Enfant Jésus les instruments de la Passion, Mars et Vénus. Mais jamais abondance ne fut plus stérile : l'habitude du pastiche malhonnête et les influences contraires de tant de modèles ont fait de ce peintre merveilleusement doué un fabricant de compositions banales et vides.

Giordano a souvent signé ses tableaux du nom latin de Jordanus, ce qui l'a fait confondre quelquefois avec le peintre flamand, Jakob Jordaens. (E. Bertaux).

En bibliothèque. - Fra Francisco de los Santos, Descripcion de las excellentes pinturas al fresco con que la Magestad del Rey Nuestro Señor Carlos II ha mandado aumentar el adorno del Real Monasterio de San Lorenzo del Escorial; s. l. n. d; - Descrizione delle pitture a fresco di Luca Giordano esistenti nella Gateria e Biblioteca Ricciardiana; Florence, 1819. - William Stirling, Annals of the artists of Spain, 1848. - Histoire des Peintres de toutes les écoles; Ecole napolitaine; article de P. Mantz, 1883.
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