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Galdos

Benito Perez Galdos est un écrivain espagnol, né le 10 mai 1845 à Las Palmas (îles Canaries), mort le 4 janvier 1920 à Madrid. Il vint de bonne heure en Espagne, fit à Madrid ses études classiques, puis passa ses examens de droit et se fit inscrire au barreau. Mais il avait peu de goût pour la profession d'avocat et ne l'exerça jamais effectivement. Il se sentit, au contraire, attiré vers le journalisme politique; d'importants journaux madrilènes lui confièrent le service des Cortès. Pendant plusieurs années, il fut l'un des principaux informateurs parlementaires de la capitale. Pendant la révolution de 1868 et la crise constitutionnelle (L'Espagne au XIXe siècle), il assista à mainte séance historique; d'où, peut-être, le goût qui l'entraînera plus tard vers l'histoire nationale.
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Perez Galdos.
Benito Perez Galdos (1845-1920).

A partir de 1870, la vocation de l'écrivain l'emporta, décidément, sur celle du journaliste. A cette date, où il écrit son premier roman, Fontaine d'Or, la littérature espagnole traverse une période de décadence. Elle est submergée sous une vague de romantisme qui a fait disparaître du roman, au profit d'imaginations bizarres ou de fades berquinades, le goût de l'observation.

Perez Galdos se propose de faire tout autre chose, et mieux. Il a défini lui-même la conception très nette qu'il s'est faite du roman. Celui-ci, dit-il, est l'image de la vie. L'art consiste à reproduire les caractères humains,

« les passions et les faiblesses, la grandeur et la petitesse, les âmes et la matière, la demeure, signe et centre de la famille, le vêtement, manifestation extérieure et dernière de la personnalité, et cela sans oublier qu'il faut tenir la balance égale entre l'exactitude et la beauté de la reproduction ». 
Donc, ni embellissement systématique de la vie au profit d'un système social ou religieux, ni, non plus, dans un but de polémique littéraire ou philosophique, la préoccupation de ne peindre que les laideurs. Comme son compatriote Murillo, Perez Galdos trouve avec raison dans tous les aspects de la vie, même les plus humbles, même les plus difformes, matière à une représentation esthétique. Mais, si créer du beau reste la raison d'être du romancier, il doit, pour se maintenir dans son rôle d'historien et d'éducateur, être exact et complet. Car le roman est de l'histoire; — mieux, comme disait Balzac, de l'« histoire naturelle ». Et le nom du romancier français évoque le nom de celui qui fut pour Perez Galdos le grand maître, celui dont il a su presque toujours appliquer la rigoureuse méthode d'observation scientifique et d'impartialité. Pour de bons juges, espagnols et français, c'est, en effet, l'oeuvre balzacienne qu'évoque celle de Perez Galdos.

A partir de 1873 et après avoir publié un deuxième roman, el Audaz, il se lance dans une voie toute nouvelle en Espagne : le roman historique, et se consacre tout entier à une histoire de l'Espagne moderne, sous la forme de ces épisodes nationaux qui doivent évoquer, pour ses compatriotes, les gloires et les douleurs de l'Espagne moderne, de Trafalgar à la guerre carliste. La cour de Charles IV, Saragosse, Bailen, puis une vingtaine de volumes se rapportant aux guerres carlistes sont des oeuvres où le roman est un prétexte à de longues évocations historiques et où l'histoire est traitée suivant de fort modernes méthodes d'exactitude documentaire. On ne saurait comparer cette oeuvre à celle de Dumas père. Elle a moins de verve débordante, moins de fantaisie. Elle évoque plutôt celle d'Erckman-Chatrian (avec plus de profondeur) et, parfois, le Balzac des Chouans.

Avec ses épisodes nationaux, tout vibrants d'esprit patriotique et dont « la vie, l'abondance et la variété firent oublier au public espagnol la prolixité et la recherche trop minutieusedu détail », Galdos atteignit la grande célébrité. ll fut consacré auteur national Il joua , du reste, un grand rôle d'éducateur. Au peuple si communément ignorant, dit un historien de la littérature espagnole, « il enseigna une histoire ignorée, il inculqua la religion de ses grands hommes. Et il nous apprend à nous-mêmes tout ce qu'il nous importe de savoir sur les constructeurs de l'Espagne au début du XIXe siècle et les héros de ces guerres civiles ».

Après les épisodes nationaux, viennent les Nouvelles espagnoles contemporaines. Fortunata y Jacinta, el Amigo Manso, Doña Perfecta, Gloria, la Familia de Leon Roch, Misericordia, Torquemada, Nazarin, sont les plus célèbres. Dans ces romans, encore, où il étudie, tout comme Balzac, la société de son temps : bourgeoisie, aristocratie provinciale, peuple, il est à la fois psychologue subtil et historien encore, non des batailles, mais de la vie journalière, et toujours largement évocateur. Il cherche, d'ailleurs, à montrer cette vie non sous ses aspects les plus bizarres ou les plus pittoresques, mais sous son aspect quotidien, et son observation est d'autant plus frappante. De certains de ses romans surgissent de grandes figures, d'une puissance vraiment balzacienne; tel Torquemada, « étonnante anatomie d'avare »; tel Nazarin, «-rival et peut-être modèle du Saint de Fogazzaro ».

Plusieurs caractères distinguent cette deuxième partie de son oeuvre. Tout d'abord, des préoccupations politiques, religieuses ou sociales. Perez Galdos fut l'un des grands représentants, rêva d'être l'un des conducteurs et fut, en effet, le conseiller spirituel du parti radical espagnol. A deux reprises, même, il fut député. Une première fois en 1885, une deuxième fois en 1910, et siégea la première fois parmi les républicains, la deuxième parmi les socialistes. La littérature lui sembla donc un utile auxiliaire de la politique. Ses romans de la seconde manière sont des machines de guerre dirigées contre le conservatisme et le cléricalisme, dont le représentant littéraire était alors Pereda. Imprégné; d'un positivisme un peu simpliste, ils ont pour héros des hommes de science, dont le génie rénove le pays. Il a subi ici l'influence de Zola. Cependant, ses romans restent bien nationaux par un humour, une truculence puisés aux pures sources populaires et qui « l'apparentent bien aux maîtres du réalisme castillan ».

Les lauriers du romancier ne lui suffisant pas, Galdos, avide de se renouveler, voulut conquérir la gloire théâtrale. Sous l'influence d'un Ibsen, il écrivit une dizaine d'oeuvres : Mariucha, Realidad, Electra, Cassandra (Celle-ci qualifiée de « nouvelle parlée en cinq jours »). Cet essai de roman théâtral ne donna pas le résultat qu'il en attendait, et Perez Galdos ne connut pas, comme dramaturge, ses immenses succès de romancier. Quoi qu'il en soit, par ses qualités comme par ses défauts, Perez Galdos fut un des écrivains, un des hommes représentatifs de l'Espagne de son temps. (L. Abhensour).

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Dictionnaire biographique
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