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François II

François II est un roi de France, né le 19 janvier 1544, mort le 4 décembre 1560, fils aîné de Henri II et de Catherine de Médicis. Il n'avait que quinze ans et demi, quand la mort tragique de son père l'appela au trône. Quoiqu'il fût légalement hors de tutelle, en vertu d'une ordonnance de Charles V, fixant à treize ans révolus la majorité de nos rois, il était trop en retard sur son âge,  - au physique, d'ailleurs, aussi bien qu'au point de vue intellectuel, - pour prendre effectivement en mains les rênes du gouvernement. A l'avènement du jeune prince, tous les esprits étaient préparés à une régence de fait. Mais qui allait recevoir de lui cette délégation tacite de la puissance souveraine? La question fut vite résolue. 

L'année d'avant, celui qui désormais s'appelait François II avait épousé Marie Stuart, reine d'Écosse, nièce par alliance des princes de la maison de Guise, ces cadets de Lorraine naturalisés Français en la personne du chef de leur famille sous le règne précédent. François ler s'était repenti par la suite de les avoir acceptés comme sujets et, à son lit de mort, avait solennellement averti l'héritier présomptif de la couronne de se défier de leur ambition. Celui-ci n'avait pris cure de ce sage conseil et, grâce à cette coupable indolence, non, moins qu'aux réels, talents qu'ils avaient déployés les uns au conseil, les autres sur les champs de bataille, on trouvait déjà de ces Français de l'avant-veille sur toutes les avenues conduisant au pouvoir, quand Henri II succomba des suites du coup de lance du comte de Montgomery (10 juillet 1559). 

Cet événement inattendu leur donnait beau jeu pour « s'advancer », et ils se hâtèrent d'en tirer tout le parti possible. Henri Il avait rendu le dernier soupir à une heure de l'après-midi: à quatre heures, le duc de Guise, s'autorisant des liens d'étroite parenté qui l'unissaient au nouveau roi et à la nouvelle reine, les força affectueusement de quitter ce palais marqué par la mort et les conduisit au Louvre, après avoir en leur nom confié la garde des restes du feu roi au connétable de Montmorency, à l'amiral de Coligny et au cardinal de Châtillon, les plus redoutables parmi ceux dont il pouvait craindre la rivalité en ces premières heures chancelantes d'une haute ascension de fortune. Restait Catherine de Médicis, veuve de Henri II, qui, elle aussi, pouvait élever des prétentions à la direction des affaires publiques. Le duc de Guise, prévoyant un danger de ce côté, l'avait emmenée au Louvre, en même temps que son fils et sa belle-fille, lui ôtant ainsi les moyens de se concerter avec Montmorency et ses neveux, les Châtillon. 

Au demeurant, Catherine avait une vieille rancune contre le connétable qui avait osé dire un jour publiquement que des enfants de Henri II, seule, sa fille naturelle, Diane, duchesse d'Angoulême, lui ressemblait; mais elle aurait pu être tentée d'oublier cet affront, de se souvenir qu'antérieurement, sous François Ier, lorsqu'il avait été question de solliciter en cour de Rome la dissolution de son mariage avec le dauphin pour cause de stérilité, Montmorency s'était constitué son protecteur et lui avait alors épargné un outrage plus cruel à coup sûr qu'une inconvenante boutade de vieillard morose, si, laissée à l'écart par les Guises, il ne lui était resté de ressource, pour avoir sa part d'autorité, qu'en l'alliance du connétable. Aussi, à peine investi officiellement, avec son frère le cardinal de Lorraine, du soin des intérêts de I'Etat, le duc s'empressa de donner une première satisfaction à la reine mère en bannissant de la cour Diane de Poitiers et Montgomery, la maîtresse et le meurtrier involontaire de Henri II. Il lui donna un second gage de déférence, plus significatif, en affectant, dans les seances du conseil privé et les réceptions solennelles qui suivirent immédiatement l'avènement, de prendre ses ordres à voix basse et en répétant à qui voulait l'entendre à propos de la moindre mesure : 

« Ainsi a plu à la reyne-mère, de la volonté de qui le roy ne doit et ne veut se départir. » 
De sorte que, quand le connétable reparut à la cour, le surlendemain des funérailles de Henri II (15 août), si l'accueil du roi fut glacial, celui de Catherine fut d'une rudesse calculée, et le vieux favori n'eut plus qu'à se retirer dans ses terres, disgracié sans espoir de retour. Quant aux princes du sang, les conseillers-nés du roi, le duc et le cardinal manifestèrent hautement par leur attitude insolente vis-à-vis d'eux le mépris où ils les tenaient et l'intention formelle de ne leur laisser aucune influence.

. Le plus près du trône après les frères de François II, Antoine de Bourbon, roi de Navarre, vient-il à Saint-Germain « faire la révérence à Sa Majesté » (18 août 1559), son maréchal des logis ne trouve que des logements insuffisants désignés pour les recevoir; il s'en plaint au duc et lui déclare que l'appartement qu'il occupe lui paraît, seul, digne du rang de son maître; aussitôt Guise de riposter : « Pour l'avoir, il vous en coûterait la vie et à 40,000 hommes! » et de chasser brutalement de sa présence le zélé serviteur. Un peu-plus tard, on assistera à ce spectacle stupéfiant : le cardinal de Lorraine, Français de hasard (on ne saurait trop le répéter, lorsqu'on parle de lui et de sa famille), écoutant, couvert, le premier prince du sang lui parler, tête nue.

Ce parti pris d'arrogance envers les représentants les plus autorisés du pays proposa la fameuse conspiration d'Amboise.

Bien qu'ils l'eussent noyée dans le sang, les Guises n'avaient pas supprimé l'opposition. Vers quelque endroit du royaume qu'ils prêtassent l'oreille, le duc et le cardinal entendaient bruire un sourd cliquetis d'armes, annonce de tempêtes prochaines. Durant tout juillet, le Limousin est en proie à des troubles sans cesse renaissants; au début de septembre, c'est au tour de Bordeaux de s'agiter; en même temps, l'échec d'une tentative de Jean de Ferrières-Maligny sur Lyon, les coupables indiscrétions d'un agent du roi de Navarre, porteur de lettres en chiffres pour les princes luthériens d'Allemagne et pour la reine d'Angleterre, sans parler d'une impérieuse requête présentée par l'amiral de Coligny à une assemblée de notables, tenue à Fontainebleau (25 août), tendant à ce que le roi proclamât officiellement qu'il ne faisait nulle différence entre ses sujets protestants et ses sujets catholiques, indiquaient à ne point s'y méprendre que l'entreprise d'Amboise aurait son lendemain et les poussèrent aux résolutions extrêmes.
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François II (colonne commémorative).
Colonne commémorative de François II, par le Primatice.
Elle était destinée à abriter son coeur. (Basilique Saint Denis).
© Photo : Serge Jodra, 2011.

Les Etats généraux venaient d'être convoqués à Orléans pour la mi-décembre. Sous l'inspiration de ses oncles, François II dépêcha au roi de Navarre, par le sieur de Crussol, l'injonction d'y paraître, ainsi que le, prince de Condé; car, disaient les instructions confiées à Crussol, 

« il avoit en depuis six mois infinité d'avertissements qu'on pratiquait des hommes pour s'émouvoir et qu'on en chargeoit ledit prince de Condé; il le prioit done de le luy amener luy-même pour ouïr en sa présence les grandes charges qui sont contre lui et les justifications ». 
Dans une lettre personnellement adressée à Antoine, le jeune souverain ne se montrait ni moins dur ni moins menaçant. Il concluait ainsi :
 « Là où on refusera de m'obéir, je saurai faire connaître que je suis le roy. » 
Plusieurs autres messages conçus dans le même style arrivèrent à Nérac tout le long du mois de septembre. Une telle invitation autorisait la défiance et même le refus d'obéir. Néanmoins, après quelque hésitation, le roi de Navarre et Condé se mirent ensemble en route, vers le 4 octobre, après s'être fait précéder d'un manifeste où, en sa qualité d'aîné, Antoine protestait au nom de tous deux de leur fidélité envers le roi et accusait les calomniateurs de dissimuler sous un zèle hypocrite leurs ambitieux projets. Nulle considération ne les arrêta sur la longue route qui sépare Nérac d'Orléans. Confiants dans la justice de leur cause, le 30, ils se présentaient devant François II. Aussitôt Condé était désarmé, emprisonné, gardé à vue, sous prévention du crime de haute trahison.

Pendant ces dramatiques événements accumulés en moins de dix-huit mois, la personnalité de François Il est complètement effacée. Çà et là on relève cependant de menus faits qui éclairent sa physionomie d'un jour triste et doux. C'est tantôt une exclamation qui lui échappe devant les Guises :

« Je ne sais ce que c'est; mais je désirerais que pour un temps vous fussiez hors d'ici, afin que l'on vit si c'est à vous ou à moi que l'on en veut » (27 mars 1560); 
tantôt, et par deux fois l'impuissance de ses oncles à se faire délivrer par lui d'un coup de poignard, au cours d'une discussion violente qu'ils se chargeaient de provoquer, d'un de leurs adversaires (le prince de Condé en avril, le roi de Navarre en novembre). A la suite de la seconde de ces inutiles et odieuses tentatives, le duc de Guise s'écria avec dépit : 
« Voilà le plus poltron coeur qui fût jamais ! »
Le procès de Condé s'était engagé sur ces entrefaites. D'avance sa condamnation à mort était certaine, lorsque le roi tomba brusquement malade. Il fallut tout suspendre jusqu'à son rétablissement. Mais les soins qui lui furent prodigués devaient être inutiles; ils s'épuisaient sur un organisme sans ressort. Le 14 décembre, François Il expirait, entraînant dans la tombe le premier effort des princes lorrains pour s'élever au rang suprême. Au moment de rendre I'âme, il murmura, dit-on, ces paroles : 
« Mon Dieu! pardonne-moi mes fautes et ne m'impute point celles que mes ministres ont commises en mon nom. » 
Vrai ou faux le désaveu par le pauvre jeune roi de ceux qui lui avaient imposé le spectacle de tant d'iniquités est la synthèse de ce règne, si court et si agité. François II fut suivi sur le trône de France par son frère Charles IX.  (Léon Marlet).
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Dictionnaire biographique
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