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Debussy

Claude Achille Debussy est un compositeur français, né le 22 août 1862 à Saint-Germain-en-Laye, mort à Paris le 26 mars 1918. C'est seulement à l'âge de onze ans que Debussy s'adonna sérieusement à la musique, sous la direction d'une amie de sa mère, qui avait deviné sa vocation en l'entendant s'essayer à jouer du piano. Il entra au Conservatoire en 1873, se distingua dans les classes de solfège et de piano, où professaient Lavignac et Marmontel, mais se montra réfractaire aux leçons de Durand, qui était chargé du cours d'harmonie
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Claude Debussy.
Claude Debussy (1862-1918).

En 1880, il obtint un premier prix d'accompagnement. II ne fit qu'une apparition à la classe d'orgue de César Franck, mais reçut avec fruit l'enseignement d'Ernest Guiraud, qui s'intéressa à lui et l'encouragea. En 1882, Debussy remporta un accessit de contrepoint et de fugue. En 1883, le second prix de Rome lui fut décerné. L'année suivante, il devenait titulaire du premier grand prix avec la cantate l'Enfant prodigue, dont le livret était dû au poète Guiraud et qu'interprétaient Rose Caron, Van Dyck et Taskin. A la Villa Médicis, Debussy retrouva Georges Marty, Gabriel Pierné et Paul Vidal. 

Son premier envoi, Almanzor, d'après Heinrich Heine, a été perdu; le second, le Printemps, où l'on pressent déjà l'Après-midi d'un faune, fut refusé par l'Intitut. La Damoiselle élue, inspirée d'un poème de Dante Gabriel Rossetti, ne fut acceptée qu'avec quelques réserves, quant au sujet, tout au moins, le « préraphaélisme » dont elle est imprégnée ayant paru irrespirable sous la coupole. L'audition officielle qui devait, aux termes des règlements, en être donnée, n'eut pas lieu. Debussy refusa, en effet, de la laisser exécuter si le Printemps ne figurait pas sur le même programme. 

Entre temps, il avait fait un court séjour en Russie, où il avait entrevu Rimsky-Korsakov, Balakirev, Borodine et écouté les improvisations des tziganes. Mais c'est plus tard que, grâce à son intimité avec un musicien aussi modeste qu'érudit, Jules de Brayer, il devait être touché par la grâce de la musique russe. Après avoir entendu Boris Godounov, de Moussorgsky, il renonça soudain à Wagner, qui l'avait, à Bayreuth, « ému jusqu'aux larmes », et s'enthousiasma pour cet art, direct, réaliste et visionnaire tout ensemble, à quoi nous devons les remarquables Chansons de la Mort

Désormais, il avait trouvé sa voie. Il y rencontra d'abord les Ariettes oubliées, les Cinq poèmes, Mandoline, entre autres. La fréquentation assidue de Mallarmé et des symbolistes, qui tendaient à tout rendre par l'image, acheva de le révéler à lui-même. A Mallarmé il dédia l'Après-midi d'un faune, qui semble l'émanation de la nature même. La musique s'y affranchit des formules, des systèmes, du protocole des gammes et des tonalités usuelles.

Elle n'est plus le truchement conventionnel qui traduit la sensibilité en équivalents, mais l'expression spontanée et comme involontaire, le « reflet », l' « image » de la sensation. Reflets dans l'eau, Images, Estampes, ce sont là, d'ailleurs, les titres de quelques-unes des oeuvres les plus caractéristiques de Claude Debussy.

Les rythmes subtils répercutent les pulsations de la vie; les dissonances acquièrent en soi une valeur expressive et se résolvent, en se volatilisant en quelque sorte, dans une atmosphère sonore, où vibre un essaim d'harmoniques secrets. La musique atteint
ainsi au profond de notre inconscient. Et c'est une séduction à laquelle, bon gré, mal gré, on ne se dérobe pas. L'Après-midi d'un faune ne compte plus, ce semble, de rebelles.

Suspect aux défenseurs de la tradition, accueilli par les musiciens de l'avenir comme un Messie, déjà choyé dans quelques cénacles, c'est par Pelléas et Mélisande que Debussy atteignit le grand public. Pendant dix ans, il médita le drame de Maeterlinck et en fut possédé. Le 30 avril 1902, Pelléas et Mélisande était représenté à l'Opéra-Comique. La répétition générale et la première représentation ne se passèrent pas sans quelque agitation. Certaines scènes choquèrent; l'orthodoxie fut déroutée par la simplicité du dessin vocal, le charme étrange des harmonies, la sonorité, comme irréelle, d'un orchestre de songe.

La critique se partagea, favorable parfois, hostile exceptionnellement ou hésitante, avec le sentiment obscur d'une beauté nouvelle qu'elle ne saisissait pas tout entière. « Enchantement mélodique et harmonique », disait-on, mais « tessiture monotone », « brouillard harmonieux », mais « déclamation juste », « orchestre clair et discret, harmonies fines et neuves - conversation musicale - vague psalmodie - poussière sonore ». Enfin « pas d'inspiration », concluait, en deux mots dont on a crucifié tant de rédempteurs, un critique dont le jugement ressemblait à une exécution. 
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Debussy.
Claude Debussy.

Mais, bientôt, les disciples arrivèrent à la rescousse. Ou les suivit. Et Pelléas, qui devait vivre deux jours, a fourni une longue carrière, donnant l'essor aux oeuvres symphoniques, aux mélodies, partout répandues, surtout aux Chansons de Bilitis, tout enveloppées du mystère de leur nostalgie, aux pièces pour piano, au Quatuor à cordes, qui demeure une des belles oeuvres de la musique de chambre de cette époque. Il faut regretter que la partition du Martyre de saint Sébastien, écrite pour le drame de d'Annunzio, n'ait eu, au Châtelet, qu'un petit nombre de représentations, troublées par l'intervention de l'autorité ecclésiastique. Elle renferme quelques-unes des pages les plus émues et les plus profondément humaines que Debussy ait écrites.
L'oeuvre de Debussy, pièces instrumentales, pour piano surtout - Debussy jouait du piano en magicien plutôt qu'en virtuose - mélodies, musique de chambre ou d'orchestre, encore qu'importante, ne décèle nulle trace de précipitation, de facilité heureuse, complaisamment exploitée, bref de cet irrespect de soi dont il est d'illustres exemples. On peut ne pas la goûter absolument; on ne peut pas ne pas honorer en elle une pure oeuvre d'art, un souci de l'expression la plus raffinée de la vérité, de la sincérité dans l'émotion et surtout, et toujours, de la musique au sens où les initiés l'entendent quand ils parlent de Mozart par exemple, ce qui, pour eux, résume et emporte tout.

Debussy a renouvelé la technique de l'expression musicale. Sans parler des plagiaires sans âme qui ont fait de ses trouvailles expressives des procédés, son émotion et sa sensibilité ont éveillé des échus un peu partout et non seulement chez les musiciens de France. Il est permis de dire que la jeune école espagnole, qu'un Albeñiz, par exemple, que la jeune école anglaise, en ont été, consciemment ou non, pénétrés et qu'il a ouvert un chemin où, de son vivant, il a peut-être été dépassé déjà.

Impressionniste et symboliste, Claude Debussy l'est assurément. Mais sa musique ne peut se définir par les mots de « pointillisme sonore » dont on a, à son égard, abusé. Elle est mélodie, rythme et logique Intérieure. Ses harmonies, déconcertantes au premier abord, et dont, au rebours des accords fauréens, nul contrepoint, même ténu, ne détermine les enchaînements, ont des affinités secrètes et correspondent par les ondes invisibles de leurs vibrations. Sa rythmique est minutieuse, multiple. Et l'analyse démontre la logique encore et l'ordre qui régissent sa composition, ses développements, et comment la fantaisie et une certaine raison s'y marient.

Debussy n'est pas toute la musique; il n'abolit rien des gloires du passé. Il a projeté sur l'avenir un rayon qui éclaire les étapes futures. Surtout, cet art délicat, mesuré, fait de charme et de pudeur et dont toute la force jaillit de l'émotion intime, cet art, né d'une instinctive révolte, d'une « réaction vitale » contre les excès et les artifices du wagnérisme, que Debussy, dans ses articles de la Revue blanche et du Gil Blas, n'a cessé de combattre, cet art, qui restitue au sentiment, à la sensation leur vérité ingénue, primesautière et ardente, s'inscrit dans une longue tradition. Il nous rattache à la lignée que Debussy chérissait de musiciens français du XVIe siècle en passant par Rameau, dont l'auteur de Pelléas a honoré la gloire d'un inoubliable hommage.

Il convient de citer, parmi les oeuvres principales de Claude Debussy :

Piano : Arabesques, Suite Bergamasque, Prélude, Sarabande Toccata, Estampes, Images, Children's Corner, Préludes.

MélodiesAriettes oubliées, Cinq Poèmes, l'Echelonnement des haies, Le son du cor s'afflige, Mandoline, Fêtes galantes, Proses lyriques, Chansons de Bilitis, Trois chansons de France, Trois ballades, le Promenoir des deux amants.

ChoeursTrois chansons à quatre voix mixtes.

Musique de chambreQuatuor à cordes. Sonate pour piano et violon. Sonate pour piano et violoncelle. Trio pour flûte, alto et harpe.

Musique symphoniquePrélude à l'Après-midi d'un Faune, Trois nocturnes, Danses pour harpe avec accompagnement d'orchestre, la Mer, images.

Voix et orchestrePrintemps, la Damoiselle élue.

Musique de scènele Martyre de saint Sébastien.

Musique dramatiquel'Enfant prodigue, Pelléas et Mélisande. 
Diverses transcriptions.

A la veille de la mort, Claude Debussy préparait un drame lyrique, le Diable dans le beffroi, d'après Edgar Poe, et un Tristan et Yseut. II a écrit, de 1901 à 1908, de nombreux articles de critique musicale dans la Revue blanche et le Gil Blas. (Paul Locard).
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