-
Jalons |
La
Sibérie pré-européenne
Premiers
habitants et peuplement préhistorique (avant 10 000 av. J.-C.)
Les
chasseurs-cueilleurs paléolithiques.
Les premières traces
de peuplement humain en Sibérie remontent à la préhistoire.
Les premiers habitants sont arrivés dans cette région au cours de la
période paléolithique. Les peuples qui
occupaient la Sibérie à cette époque étaient principalement des chasseurs-cueilleurs
et des pêcheurs. Ils se nourrissaient de gibier (mammouths, rennes, bisons,
etc.), de poissons et de baies. Des outils en pierre et en os ont été
retrouvés sur plusieurs sites archéologiques sibériens, notamment dans
la grotte de Denisova dans les montagnes de l'Altaï ,
qui ont révélé des artefacts de cultures anciennes et les premières
traces de Denisoviens, une population humaine archaïque.
Les
Denisoviens étaient une espèce d'hominidés qui vivaient entre 200.000
et 50 000 ans avant le présent (Paléolithique
moyen), et qui étaient apparentés aux Néandertaliens. Ils sont principalement
connu par des fragments osseux et dentaires, ainsi que par leur ADN.
Leur morphologie exacte este incertaine, mais probablement similaire Ã
celle des Néandertaliens. Ils ont contribué à l'ADN
des populations humaines modernes en Asie
et en Océanie, indiquant des croisements
avec Homo sapiens.
La
transition du Paléolithique au Mésolithique
Vers 10 000 av.
JC, avec la fin de la dernière glaciation, des changements climatiques
ont modifié les écosystèmes sibériens, incitant les peuples à adapter
leur mode de vie. Ils ont commencé à explorer de nouvelles ressources
et à se déplacer en fonction des saisons. Les groupes nomades se sont
peu à peu établis dans les zones forestières et les steppes, exploitant
des animaux sauvages et développant des techniques de pêche.
L'Antiquité et
les premières civilisations sibériennes.
Les
peuples nomades et les contacts avec l'Asie centrale.
Au Ier
millénaire
av. J.-C., des populations nomades d'origines iraniennes et turques ont
commencé à apparaître dans les steppes sibériennes. Ils étaient en
contact avec les civilisations de l'Asie
centrale, notamment les Scythes et
les Sarmates, qui ont influencé la culture
de la région. Ces populations nomades ont introduit de nouvelles pratiques
militaires, en particulier la cavalerie montée et l'utilisation de l'arc.
Des groupes comme
les Saces, descendants des Scythes, ont habité les vastes steppes de la
Sibérie, et ont établi des échanges commerciaux avec les civilisations
voisines, notamment avec les Chinois et les Perses.
Les
premières cultures sibériennes.
Au cours de cette
période, plusieurs cultures protohistoriques se sont développées. Des
peuples comme les Khanty, les Mansi, et les Bouriates ont commencé Ã
s'établir dans les forêts de la taïga et les plaines de Sibérie, utilisant
principalement la chasse, la pêche et l'élevage de rennes.
L'Âge du Fer
et les influences turco-mongoles.
Au cours de l'Âge
du Fer (500 av. JC. - 500 ap. JC), des groupes comme les Türks
et les Evenks ( = Toungouses) ont migré
vers la Sibérie et se sont installés dans les steppes et forêts. Ils
ont joué un rôle central dans la transformation culturelle de la région.
L'expansion
des populations turques.
Les Türks ont établi
plusieurs royaumes et confédérations en Asie centrale et en Sibérie.
La région fut marquée par l'arrivée du Kaganat des Türks au VIe
siècle de notre ère, qui s'étendait de l'Asie centrale jusqu'à la Sibérie
orientale. Les Türks ont transmis leurs techniques de métallurgie du
fer et leurs connaissances en matière de chevaux et de cavalerie.
Les
incursions des Mongols.
À partir du VIIe
siècle, les ancêtres des Mongols (comme
les Xiongnu) ont commencé à se déplacer vers le nord et l'est, en contact
avec les peuples sibériens. Ces groupes ont fait partie des diverses vagues
de peuplement dans la région, qui ont progressivement façonné les cultures
locales, notamment par la diffusion des langues et des pratiques tribales.
Chinois et Mongols.
Les
contacts avec la Chine (1000 - 1200).
Les dynasties chinoises,
telles que les Tang et les Song,
ont cherché à étendre leur influence au nord, en particulier dans les
régions sibériennes proches de la Mongolie et de la Manchourie. Ils ont
établi des routes commerciales avec la Sibérie, mais les tentatives d'expansion
chinoise n'ont pas permis une domination durable sur les vastes terres
sibériennes. Les Xianbei, des populations d'origine mongole et turque,
ont constitué une entité confédérale qui a ainsi interagi avec les
Chinois tout en maintenant leur autonomie en Sibérie.
Le
temps de l'Empire mongol (1200 - 1500).
Au XIIIe
siècle, les Mongols, conduits par Gengis Khan, ont envahi une grande partie
de l'Asie, dont des régions de la Sibérie orientale. Les Mongols ont
fondé l'Empire mongol qui s'étendait
du Chine à l'Europe de l'Est. Cependant, la Sibérie, bien que largement
dominée par les Mongols, est restée une terre de confédérations tribales
plus ou moins indépendantes. Les peuples locaux ont intégré certaines
influences culturelles mongoles tout en conservant leurs traditions. Les
Evenks et les Bouriates sont des exemples de ces groupes qui ont vu leur
organisation sociale et politique modifiée par l'influence mongole, mais
qui ont continué à maintenir une certaine autonomie.
L'expansion
des Européens
La « Conquête
de l'Est ».
La Sibérie (Sibir)
était déjà connue des Novogorodiens.
Ces derniers, prétend-on, étaient déjà en relations commerciales avec
les habitants d'au « delà de l'Oural », avec les « gens de l'Est »,
dans le courant du XIIe siècle. Ce fut
vers la fin du XVe siècle que des bandes
de Cosaques, commandées par un chef des plus
entreprenants,
Timotheévitch Ermak, fuyant devant
les troupes régulières russes qui les pourchassaient, se réfugièrent
sur les propriétés de la compagnie commerciale dirigée par les Stroganov,
et situées dans l'Oural. Cette compagnie était une sorte de compagnie
à charte, qui obtint, vers 1560, du tsar Ivan le
Terrible, le droit de commercer dans le bassin de la Kama. Entrés
au service de la Compagnie Stroganov, Ermak et ses partisans n'eurent rien
de plus pressé que d'aller piller la demeure du sultan Koutchoum - l'ennemi
éternel des chrériens orthodoxes - en résidence à Isker ou Sibir (Ã
l'emplacement du Tobolsk actuel). La ville
fut prise le 26 octobre 1581. Dès ce moment, la Sibérie fut possession
russe. Les progrès de la petite troupe furent en effet assez rapides.
Les indigènes, peut-être surpris par la brusquerie de l'attaque, résistèrent
mollement. Les Cosaques, dans un but de pillage, probablement, n'eurent
pas de peine à refouler les Tatars vers les steppes du Sud, et, bien qu'ils
eussent été obligés de repasser l'Oural, la Russie
ne négligea pas de revendiquer ses droits sur le pays ainsi conquis. Tioumen,
fondé en 1586, et Tobolsk ( Le
Voyage en Sibérie de Chappe d'Auteroche)
érigé sur l'emplacement de l'une des anciennes résidences du khan,
en 1587, devinrent des points d'appui redoutables entre les mains d'une
nation chrétienne. Ermak, tué dans une surprise par les Tatars, en 1584,
sur les bords de l'Irtych, eut des émules.
Les atamans Soukine,
Miasnov, Tchoulkov continuèrent, à la tête de petites troupes de 300
à 500 hommes, l'oeuvre commencée par Ermak. D'autres campements ou ostrogs
- réduits entourés de palissades, analogues aux forts de la compagnie
de la baie d'Hudson
- Verkhotourié, Blein, Berezov, Sourgout,
Obdorsk, Narym, Ketsk, Tara, furent édifiés en vue de se garantir contre
un retour offensif des Tatars. Pas à pas, les troupes cosaques pénétrèrent
ainsi en avant dans le pays. Tourinsk fut fondé en 1608, Tomsk en 1609,
Ienisseïsk en 1617-18,
Krasnoïarsk
en 1626; l'année suivante, on atteignait l'Angara; en 1632 on fondait
Iakoutsk. En 1636, le Cosaque Elisée Bouza descendit la Lena jusqu'Ã
l'Océan, pendant qu'un autre chef cosaque, Jean Postnik, atteignait, par
terre, la rivière Kolymna. Un autre encore, Erofeï Pavlovitch Khabarov,
opère, avec une poignée de partisans, une descente vers le Sud et réussit
a s'établir dans le bas Amour (1649 -53). En 1652, fondation d'Irkoutsk;
en 1656, de Nertchinsk; en 1699, conquête du Kamtchatka. En 1708 fut organisé
un gouvernement de Sibérie, avec Tobolsk
pour capitale; en 1719, une province d'Irkoutsk; en 1806, un gouvernement
général de Sibérie, dédoublé en 1822.
L'occupation des
steppes kirghiz, dans le Sud-Ouest. de
la Sibérie, ne put être faite, toutefois, que dans le courant du XVIIIe
siècle. Ce fut le prélude de la pénétration russe dans l'Asie centrale.
L'occupation s'est opérée sans coup férir, graduellement. Dans le bassin
de l'Amour, aussi, les Russes se heurtèrent contre les Mandchous ( Evenks)
qui venaient de conquérir la Chine. Ceux-ci ayant été à leur tour absorbés
par les Célestes, les Russes n'eurent pas beaucoup de peine à obtenir,
d'abord, de ces derniers la rétrocession des provinces du Nord (provinces
de l'Amour) et du littoral situé au Sud du fleuve, occupées en 1852 et
abandonnées par la Chine lors des traités du 28 mai 1858 et du 14 novembre
1860, puis, des Japonais ,
en échange des îles Kouriles, les parties
méridionales de l'île Sakhaline (28 août
1875).
--
L'autre «
Frontière »
Lorsqu'ils investissent
la Sibérie, les Russes se confrontent à des populations très diverses
: Finno-ougriens (Ostiaks, Vogouls, Samoyèdes, etc.), Turks
(Tatars, Kirghiz, Ouzbeks, etc.), Mongols
(Bouriates, Kalmouk, etc.), peuples paléoarctiques (Tchouchtches, Kamtchadales,
etc.). Ces populations ont également des modes de vie très divers : les
Samoyèdes, les Ostiaks pêcheurs, les Vogouls sont nomades. On trouve
aussi des nomades agriculteurs parmi les montagnards de l'Altaï, ainsi
que chez les Bouriates et les autres Mongols. Les Kirghiz, qui forment
la population la plus nombreuse, sont en majeure partie éleveurs et nomades,
et tendront toutefois, sous la pression russe, à devenir sédentaires
tout comme les Tatars de la Sibérie centrale.
Au point de vue des
cultes, la majeure partie des habitants indigènes de la Sibérie pratiqueient
des religions chamanistes .
La religion bouddhique
avait conquis le plus grand nombre de ses adhérents parmi les Bouriates.
L'Islam ,
prêché par des émissaires venus de Boukhara ( Le
Kharezm et les khanats ouzbeks) et d'autres points du centre asiatique,
avait fait des progrès immenses parmi toutes les autres populations, et
particulièrement parmi les Tatars et les Kirghiz. Seuls, les Ostiaks et
quelques peuplades finnoises avaient été sensibles à la religion chrétienne .
L'activité des missionnaires orthodoxes ne remontait, d'ailleurs, qu'Ã
environ 1830.
Progressivement soumises
au Russes, ces populations n'ont pas seulement vu leur mode de vie changer.
Leur démographie a été profondément affectée. Ainsi, dans le district
de Touroukhansk, la population indigène a diminué de deux tiers durant
les années 1763 à 1816. En 1744, on comptait 20 000 Kamtchadales des
deux sexes; ils n'étaient plus que 2 760 en 1823, et 1969 en 1850. Les
Vogouls, dont on comptait encore en 1859, 4 527 individus, n'étaient plus,
en 1875, que 3 913. Les guerres de tribus à tribus, la petite vérole,
le scorbut, la syphilis - peut-être aussi les liqueurs fortes introduites
par les Russes et diverses répressions opérées par le vainqueur - n'ont
pas été étrangères à la lente décroissance des populations sibériennes,
quand ce n'est pas simplement à la disparition de certaines d'entre elles
(Omaks, Koths, Khoidams, Chelagues, Anuïtes, Matores, Assans).
Au XIXe
siècle, la progression des Russes en Sibérie rappelle la « conquête
de l'Ouest » qui se livre au même moment en Amérique. Il convient de
noter cependant, que la situation était assez différente auparavant.
La conquête de la Sibérie par les Russes ne pouvait pas avoir les mêmes
conséquences pour les peuples asiatiques qu'eut l'arrivée des Européens
sur le continent américain et en Australie, simplement parce que pendant
longtemps les civilisations russe et asiatiques n'étaient pas si éloignées
l'une de l'autre - aux XVIIe et XVIIIe
siècles du moins. |
La colonisation.
Mais la véritable
conquête du pays, la conquête économique du moins, s'est opérée par
la colonisation, laquelle, à l'instar de ce qui s'est passé dans les
colonies anglaises de l'Australie, a eu un caractère double : colonisation
libre et colonisation forcée, ou déportation.
Colonisation libre.
- Les premières colonisations du pays furent celles des conquérants.
Les détachements de Cosaques, partis pour opérer des razzias, étaient
suivis d'ecclésiastiques, de paysans, de citadins. Les Cosaques, de leur
côté, les opérations de guerre terminées, redevenaient forcément agriculteurs,
puisque le pays ne renfermait aucune provision abondante, et la culture
était une nécessité de subsistance. Le gouvernement russe, de son côté,
dès le début du XVIIe siècle, encourageait
l'immigration des agriculteurs en leur fournissant le transport gratuit.
Les nouveaux arrivés bénéficiaient aussi d'une exemption d'impôts durant
les trois premières années de leur établissement. Une autre catégorie
de paysans venaient peupler les solitudes de la Sibérie. C'étaient surtout
des serfs qui fuyaient le régime du servage, des jeunes hommes désireux
de se soustraire à la conscription. Des mesures administratives, aussi
nombreuses que divergentes, n'eurent pourtant aucune influence réelle
sur la colonisation libre, et, vers le milieu du XIXe
siècle (1851), le nombre des habitants de la Sibérie était à peine
de 2 400 000 individus. L'émigration vers la Sibérie prit un essor particulier
dans la seconde moitié du XIXe siècle;
d'abord, Ã la suite de l'abolition de
l'esclavage; en second lieu, par la nécessité réelle de trouver
de l'espace, des terrains propres à nourrir une population surchargée.
Réduits souvent
à la plus profonde misère, à la disette même, tant à la suite de plusieurs
mauvaises récoltes que par une surabondance de population, les paysans
de tous les coins de la Russie
d'Europe cherchent à se donner de l'air. La perspective d'une longue distance
à franchir ne les rebute nullement, convaincus qu'un « ailleurs » quel
qu'il soit sera toujours préférable à un « ici », invivable. Des comités
philanthropiques s'étaient formés, en outre, tant dans la Russie d'Europe
qu'en Sibérie, pour faciliter aux émigrants le long passage. Les débuts
de ces exodes en masses ont été désastreux. La moitié des émigrants
périssaient en route. Ceux qui parvenaient à destination étaient épuisés
de fatigues et de privations avant de pouvoir choisir le lieu de résidence.
Il convient d'ajouter que la plupart des émigrants se faisaient suivre
par leurs familles. Femmes et enfants étaient entassés dans de misérables
charrettes, exposés à toutes les rigueurs d'un climat inclément.
Des mesures préventives
durent être prises. Par la suite, lorsque plusieurs familles d'un canton
ou volost exprimeront le désir d'émigrer en Sibérie, on les invitera
d'abord à se concerter sur le district qu'ils veulent choisir pour résidence,
et si l'on juge que l'autorisation pourra être accordée, on fera désigner
aux émigrants un ou deux délégués qui seront chargés de visiter le
pays et reviendront rendre compte à leurs mandataires de la valeur du
terrain choisi. Ils pourront ainsi prendre une décision en connaissance
de cause. Les statistiques établissent que, durant les années 1887-95,
la Sibérie a reçu 94 000 familles russes, comprenant 467 000 personnes.
Les travaux du chemin de fer entrepris en Sibérie ont fourni un nouvel
essor à l'émigration; on admet qu'à partir de 1897, le nombre d'immigrants
dépassait annuellement le chiffre de 200 000 (206 000 en 1898, 225 000
en 1899). Un effort fut également consenti à cette époque par le gouvernement
russe pour transformer la Sibérie d'autrefois - pays de bagne et
d'exil - en territoire productif, capable d'un développement économique.
Dans le but d'encourager la coIonisation, un décret impérial accorda,
au mois de juillet 1898, pour la durée de dix années, le droit de franchise
pour toutes machines et outils de provenance étrangère à destination
de la Sibérie. Le délai de dix ans a été jugé suffisant pour encourager
l'importation de l'outillage nécessaire à l'agriculture et son installation.
Colonisation pénale.
- Un autre contingent considérable à la population de la Sibérie fut
fourni par les colons forcés ou déportés. La déportation de criminels
en
Sibérie commença
vers la fin du XVIe siècle (1593); elle
fut introduite dans la législation russe, comme système de répression,
par le tsar Alexis Mikhaïlovitch, en 1648. Entièrement abolie par un
oukase
(= décret) de Nicolas II, en 1899, la Sibérie aura donc existé, comme
terre d'exil ou bagne, exactement durant deux siècles et demi.
Dès cette époque,
le nom de Sibérie devint synonyme de bagne ou de terre infernale. D'abord
simple lieu d'internement pour les individus coupables d'une faute légère,
la Sibérie fut désignée, sous Pierre le Grand
( L'Empire
de Pierre), pour recevoir les condamnés aux travaux forcés. L'abolition
de la peine de mort, en 1753, par l'impératrice Élisabeth ( Le
Printemps des tsarines), et son remplacement par la déportation en
Sibérie, fut le point de départ d'une recrudescence dans le peuplement
de ce pays.
Un autre élément
à la déportation fut fourni par les diverses insurrections. Les prisonniers
de guerre (Suédois, Polonais) furent également expédiés en masse sur
les divers points de la Sibérie. La moyenne annuelle du chiffre des déportés,
de 1850 Ã 1890, fut de 19 000, y compris des milliers d'enfants qui suivaient
leurs parents. Le lieu de l'internement variait avec la gravité de la
faute commise. Les degrés de la pénalité consistaient :
1° en exil
simple, avec facilité de circuler dans tout le territoire;
2° relégation ou
résidence forcée dans une région déterminée;
3° travaux forcés.
La poésie et les légendes
populaires n'ont pas peu contribué à rendre redoutable aux Russes cette
terre d'exil. Mais ce qui frappait particulièrement les esprits, c'étaient
les récits des longues marches des condamnés, obligés de traverser Ã
pied, chargés de chaînes, les longues distances qui séparaient le lieu
d'internement de l'intérieur de la Russie
d'Europe. Un tableau peint par un étranger et représentant la lamentable
procession de ces infortunés fit - à en croire du moins la propagande
tsariste - une impression douloureuse sur l'esprit de Nicolas ler
, qui ordonna, vers 1850, de faire faire désormais aux prisonniers le
chemin par voies ferrées et par eau. On évaluait cependant en 1900 le
nombre des déportés à 200 000 en Sibérie, non compris leurs familles.
-
La vie intellectuelle
Les conditions de
peuplement de la Sibérie ont certainement contribué à retarder le développement
intellectuel de différentes parties de la Sibérie. Celui-ci a cependant
a pris à partir de la seconde moitié du XIXe
siècle une extension considérable, grâce à l'émergence d'une intelligentzia
sibérienne, aisni qu'aux efforts des mécènes (Yadrintzev, Sibiriakov),
voire au bon vouloir des autorités centrales. Ainsi, les voyageurs occidentaux
ne seront pas peu surpris de rencontrer dans certaines villes, parfois
après un voyage de plusieurs semaines à travers les forêts du Nord,
des cercles amicaux où sont discutés les mérites littéraires ou artistiques
d'une oeuvre parue peu de temps auparavant dans l'une des capitales de
l'Europe.
Mais la plus grande
somme du bien-être relatif de la Sibérie à partir de cette époque,
comme aux connaissances géographiques que l'on commence à avoir du pays,
est due à une véritable pléiade de savants exilés sur la terre de Sibérie
pour des raisons d'ordre politique et qui ont fait montre d'une féconde
activité. Etudiants compromis dans des troubles universitaires (Kropotkine,
Potanine),
Polonais exilés pour des manifestations séparatistes, trouvaient dans
l'étude et dans l'exploration une consolation dans leur solitude.
Une forte rivalité
exista longtemps entre les villes de Tomsk et d'Omsk
pour l'honneur de posséder l'Université de Sibérie, créée grâce aux
efforts persévérants de quelques Sibériens. Cet honneur échut finalement
à la ville de Tomsk. L'inauguration de l'Université (10 / 22 juin 1888)
fut une fête pour toute la Sibérie. L'établissement était dû presque
entièrement à la libéralité de quelques particuliers (Demidov,
Tziboulski, Sibiriakov) et de diverses associations littéraires qui se
sont chargées de couvrir les frais de construction (un peu plus de 400
000 roubles) et d'assurer diverses bourses aux étudiants nécessiteux. |
Le
temps des explorations
Intiment liées Ã
l'expansion commerciale, presque toutes les tentatives d'exploration de
la Sibérie - comme d'ailleurs la conquête du pays par les Cosaques -
ont été faites par voie d'eau. L'histoire conserve peu de données sur
la participation des Russes à l'ouverture de la Sibérie au commerce européen.
Les efforts tentés par les Novogorodiens (XVIe
siècle) se concentraient, comme il a déjà été dit plus haut, sur les
voies terrestres, Ã travers l'Oural. En l'an 1600, le prince Chakhovski,
accompagné d'une centaine de Cosaques, descendit l'Ob à partir de Berezov;
mais les barques furent assaillies par des Samoyèdes, et la petite expédition,
à moitié détruite, dut chercher son salut dans la fuite. Une autre
expédition fut organisée l'année suivante, sous les ordres du prince
Mossalski, qui parvint cette fois à l'embouchure du Taz et y fonda
la ville de Mangazea. Cette ville n'eut d'ailleurs qu'une très courte
durée. Détruite par un incendie en 1640, ses habitants se réfugièrent
à Tourkhansk et à Ienisseïsk. Les essais de pénétration faits par
des commerçants de nationalité étrangère (européenne) furent plus
importants. Des trois bâtiments qui faisaient partie de l'expédition
(1553) de Sébastien Cabot, l'un, commandé par
Chancellor,
put pénétrer jusqu'à l'embouchure de la Duna septentrionale. Son retour
en Angleterre fut marqué par la formation de la célèbre association
commerciale connue sous le nom de «-Muscovy
Company », qui reçut de nombreux privilèges de la part des deux
gouvernements, mais dont les opérations n'eurent pas beaucoup de succès.
La mer de Kara
resta obstinément fermée aux diverses autres expéditions qui se sont
succédé depuis : expéditions des Anglais Pet et Jackman (1580), expédition
d'Hudson (1608). Les autres expéditions, jusqu'Ã
la fin du XIXe siècle même (expédition
de Nordenskjöld sur la Véga, 1878),
ne visèrent plus qu'à l'ouverture ou à la découverte, d'un passage
Nord-Est. Mais pour ce qui intéresse particulièrement la Sibérie, deux
faits semblent dès cette époque destinés à opérer une transformation
des plus heureuses dans les relations du Nord de la Sibérie avec le reste
du monde, ainsi que dans la mise à profit de ses vastes réseaux fluviaux.
Déjà , en 1862 et en 1869, à la suite d'une forte prime promise au navire
qui pénétrerait dans le Ienisseï par la mer, promesse faite par un riche
Sibérien, Sidorov, les Anglais tentèrent de pénétrer dans ce fleuve,
mais sans succès. D'autres essais, également infructueux, furent faits
en 1878 et en 1887. Mais ces insuccès n'ont pas découragé les Anglais,
et une nouvelle tentative fut faite en 1896. Cette fois trois vapeurs réussirent
à pénétrer jusqu'à Touroukhansk, à 200 lieues de l'estuaire
de l'Ienisseï. Là , la cargaison fut déchargée sur de grandes barges
que des remorqueurs ont conduites jusqu'à Krasnoïarsk. La tentative fut
renouvelée, en 1897 et en 1898, avec le même succès. Le nombre de vapeurs
fut d'abord doublé, puis triplé, et quelques-uns pénétrèrent aussi
dans l'Ob qu'ils remontèrent jusqu'au delà d'Obdorsk. Afin d'encourager
cette entreprise, le gouvernement supprima totalement les droits de douanes
sur tous les articles importés en Sibérie par la voie de l'océan Arctique.
Un autre fait de
presque égale importance à cette même époque est l'invention par
Komarov des navires brise-glace, expérimentée avec succès par l'amiral
Makarov; ces navires sont d'abord destinés à la navigation dans
la mer de Kara, libre de glace durant deux mois de l'année seulement.
Ils doivent servir également de transports sur le Baïkal durant la saison
d'hiver.
On ajoutera pour
terminer, que la Société impériale russe de géographie, qui avait son
siège à Saint-Pétersbourg, fut souvent chargée de l'organisation
et de l'équipement des nombreuses explorations scientifiques qui ont sillonné
l'empire russe et une grande partie du continent asiatique durant toute
la seconde moitié du XIXe siècle. Des
sections de cette société furent établies sur différents points du
territoire, en Europe et en Asie. On a notamment procédé sous sa
conduite à des levers des côtes Nord de la Sibérie, et des expéditions
scientifiques bien outillées qui ont étudié les régimes des différents
cours d'eau. Le service hydrographique de la marine s'occupant activement
à dresser les cartes des principaux fleuves, des travaux de balisage,
des phares, etc. (P. Lemosof).
Histoire
du Transsibérien
Le Transsibérien
est l'un des chemins de fer les plus emblématiques et longs du monde,
reliant Moscou, la capitale de la Russie européenne,
à Vladivostok, une ville portuaire située
sur la côte pacifique. Ce chemin de fer a traversé l'histoire de la Russie,
de l'Empire russe à l'Union soviétique, et jusqu'à la Russie moderne.
À la fin du XIXe
siècle, l'Empire russe se trouve confronté à un besoin de modernisation
et de développement de son infrastructure pour relier ses vastes territoires,
particulièrement ceux de la Sibérie, à l'Europe. La Sibérie, riche
en ressources naturelles, reste largement isolée du reste du pays, et
le transport terrestre est difficile en raison de l'immensité et de l'inaccessibilité
des régions. Le Transsibérien est envisagé comme une solution pour relier
ces vastes territoires et stimuler l'économie, faciliter le peuplement
de la Sibérie, et renforcer le contrôle de l'État sur ces régions.
La construition de ce chemin de fer est finalement lancée en 1891 par
le tsar Alexandre III et son fils, Nicolas II. La ligne a été divisée
en plusieurs sections pour faciliter sa construction.
La première pierre
du Transsibérien cette année-là sous la direction de l'ingénieur Sergei
Witte, le ministre des Finances. Les travaux commencent à la fois à l'ouest
(Moscou) et à l'est (Vladivostok), mais en raison des vastes distances
et de la géographie difficile, la construction est longue et complexe.
La ligne traverse des montagnes, des rivières, des steppes et des forêts,
et le travail est rendu plus ardu par des conditions météorologiques
extrêmes (froid sibérien) et l'isolement des zones de travail. Le chemin
de fer doit également traverser des zones inhabitées et peu développées,
nécessitant des infrastructures temporaires et des colonies de travailleurs.
Le Transsibérien va être inauguré par sections. La première ligne,
reliant Moscou à Samara, est ouverte en 1892. En 1900, la ligne
arrive à Omsk, à mi-chemin de la Sibérie. La traversée complète
, entre Moscou et Vladivostok, est achevée en 1916.
Le chemin de fer
joue un rôle stratégique pendant la Première
Guerre mondiale, en facilitant le transport de troupes et de matériel
vers l'Est. Après la guerre, le Transsibérien reste une artère vitale.
Après la révolution bolchévique de 1917 et la formation de l'Union soviétique,
le Transsibérien devient aussi un symbole de la puissance industrielle
soviétique. Le gouvernement continue d'investir dans le réseau ferroviaire
pour soutenir son programme d'industrialisation et pour maintenir le contrôle
sur le vaste territoire soviétique. Au fil des décennies, le Transsibérien
est intégré à un réseau ferroviaire plus large, avec des extensions
et des lignes secondaires qui relient des régions isolées à la principale
ligne transsibérienne. Durant la période soviétique, le Transsibérien
est modernisé avec des améliorations technologiques, des trains
plus rapides et des stations de plus en plus modernes. Pendant la Guerre
froide, le Transsibérien reste une artère vitale, transportant des
ressources naturelles depuis l'Asie centrale et la Sibérie vers l'Europe
de l'Est, et facilitant le déplacement rapide de forces militaires en
période de tensions avec l'Occident.
Avec l'effondrement
de l'Union soviétique en 1991, la Russie entreprend des réformes pour
moderniser le réseau ferroviaire et améliorer la qualité des services.
Les compagnies ferroviaires privées voient également vu le jour, bien
que la plupart des lignes restent gérées par RZD (Chemins de fer russes).
Le Transsibérien est aujourd'hui l'une des lignes ferroviaires les plus
célèbres du monde, attirant les touristes du monde entier. Le trajet
complet, reliant Moscou à Vladivostok, dure environ 7 jours. |
La Sibérie pendant
la période soviétique
La Révolution russe
et la guerre civile.
Pendant la guerre
civile qui a suivi la Révolution russe de 1917 et la chute de l'Empire
tsariste, Bolcheviks (soutenant les Soviets) se sont affrontées avec les
Blancs, composées de monarchistes et de militaires tsaristes. Les régions
sibériennes ont été un terrain de batailles intenses, car elles étaient
stratégiquement importantes pour l'approvisionnement en ressources et
pour le contrôle des voies de communication (notamment les chemins de
fer).
Les forces blanches
ont initialement gagné du terrain en Sibérie, notamment dans les grandes
villes comme Omsk et Irkoutsk, mais elles ont fini par être repoussées
par l'Armée rouge bolchevique. Les partisans des Soviets ont réussi Ã
établir leur domination, et après 1923, la Sibérie est devenue fermement
intégrée à l'Union soviétique.
L'ère stalinienne.
Sous le régime
de Joseph Staline (1924-1953), la Sibérie a joué un rôle important dans
les politiques d'industrialisation et de collectivisation du pays. La région
a été utilisée comme terrain pour des projets industriels et agricoles
de grande envergure, comme la construction de complexes industriels dans
des villes comme Norilsk et Vorkouta. Les populations autochtones ont subi
une répression brutale, et leurs terres ont été attribuées aux grands
projets agricoles collectifs. Des milliers de fermes ont été collectivisées,
et des millions de personnes ont été forcées à travailler dans des
conditions extrêmement dures, notamment dans des camps de travail où
des prisonniers et des déportés étaient exploités.
Sous Staline, la
Sibérie est devenue synonyme des goulags, un vaste réseau de camps de
travail forcé, héritages de la politique pénitentiaire tsariste, dans
lesquels des millions de prisonniers politiques, de criminalisés et de
minorités ethniques ont été enfermés. Ces camps étaient généralement
situés dans des régions reculées et extrêmement froides, comme celles
de Kolyma, dans le nord-est de la Sibérie. La Sibérie a ainsi été l'un
des principaux lieux de déportation et de répression politique. L'ampleur
de cette répression est restée un élément central de l'histoire soviétique
et a eu des conséquences dévastatrices sur la population. La population
autochtone sibérienne, ainsi que les Sahals, Tchouktches, Koryaks, et
autres populations de la Sibérie orientale ont été particulièrement
touchés par ces politiques de déportation.
Durant la Seconde
Guerre mondiale, l'immensité de la région, son éloignement des fronts
de bataille et ses ressources naturelles ont permis à l'Union
soviétique de déplacer des usines et des infrastructures industrielles
vitales vers l'Est, Ã l'abri des attaques nazies. La main-d'Å“uvre des
prisonniers de guerre et des déportés a été utilisée pour construire
des armes et du matériel militaire dans des villes comme Novossibirsk
et Krasnoïarsk.
À partir des années
1930, la répression stalinienne a également touché de nombreux groupes
ethniques en Sibérie. Les Tchouktches, Koryaks, et d'autres populations
autochtones ont été forcés de s'adapter aux exigences de l'État soviétique,
notamment par des politiques de russeisation et de collectivisation.
La Sibérie dans la
Russie post-soviétique
Avec la dislocation
de l'Union soviétique en 1991, la Sibérie
fait partie de la Fédération de Russie. Cependant, la transition vers
une économie de marché libre n'a pas été facile pour la région. L'effondrement
de l'industrie soviétique a conduit à une récession, et la région a
souffert d'un manque d'investissements, bien que des secteurs comme l'exploitation
minière, le gaz et le pétrole aient continué à jouer un rôle majeur
dans l'économie.
La Sibérie a été
confrontée à plusieurs problèmes sociaux et environnementaux. L'exploitation
des ressources naturelles a continué, mais souvent avec des impacts environnementaux
dramatiques. Des accidents écologiques majeurs, comme ceux liés à la
pollution industrielle en Sibérie occidentale, ont affecté des populations
locales, qui ont continué à lutter pour leurs droits sur leurs terres,
la reconnaissance de leurs traditions et la préservation de leur mode
de vie face aux pressions économiques et écologiques.
Malgré ces défis,
certaines régions sibériennes ont connu un développement rapide. Des
villes comme Novossibirsk, Omsk, Krasnoïarsk, et Irkoutsk sont devenues
des centres économiques dynamiques. En outre, l'expansion du gazoduc Sibérie
a facilité les exportations russes, notamment vers la Chine.
Enjeux et défis
actuels.
Une des questions
contemporaines de la Sibérie est le rééquilibrage démographique et
les tensions potentielles avec la Chine, qui a montré un intérêt croissant
pour l'acquisition de terres sibériennes. Certaines régions sibériennes
sont également confrontées à un déclin démographique important, la
population vieillissant rapidement, tandis que la migration intérieure
vers Moscou et Saint-Pétersbourg
est élevée. Notons également ici le rôle joué par la guerre de la
Russie contre l'Ukraine depuis 2022, et
qui a vu sacrifier sur le front préférentiellement des Sibériens et
d'autres populations issues de minorités ethniques, et a relativement
préservé les populations des grandes villes de l'Ouest de la Russie.
La Sibérie est riche
en ressources naturelles (pétrole, gaz, minerais), et leur exploitation
a des conséquences néfastes sur les terres des autochtones. Les activités
minières et pétrolières perturbent les écosystèmes et affectent l'élevage
de rennes et la chasse. Le mode de vie traditionnel et la transmission
des savoirs ancestraux sont menacés par la modernisation, la migration
vers les villes et l'influence du mode de vie russe. Le réchauffement
climatique affecte sévèrement la Sibérie, avec le dégel du pergélisol,
des changements dans la migration des rennes et la réduction des populations
animales.
D'un autre côté,
des progrès sont aussi réalisés, notamment avec la promotion des droits
des populations autochtones dans le cadre de la Déclaration des Nations
Unies sur les droits des peuples autochtones reconnaît le droit des
peuples autochtones de conserver leur culture et de gérer leurs terres.
Des efforts sont faits pour revitaliser les langues autochtones grâce
à des programmes d'enseignement bilingue et des projets de documentation
linguistique. Des festivals culturels, comme ceux organisés en Iakoutie,
mettent en valeur les danses, les chants, les costumes et les rituels chamaniques
pour valoriser les cultures autochtones.
Les populations autochtones
de Sibérie
Les peuples autochtones
de Sibérie sont répartis dans plusieurs grandes régions avec des climats
et des écosystèmes très divers. On peut notamment mentionner :
Les Iakoutes (ou
Sakhas).
Les Iakoutes, qui
se nomment eux-mêmes Sakhas, sont l'un des peuples les plus nombreux de
la Sibérie orientale. Ils sont principalement établis en République
de Sakha (Yakoutie), une vaste région du nord-est de la Russie. Les Iakoutes
sont originellement des populations turcophones venues probablement de
Mongolie et des steppes du sud de la Sibérie. Ils parlent le sakha, une
langue turque, mais le russe est également largement répandu. Leur culture
se caractérise par une riche tradition de contes, de chants et de poèmes
épiques, appelés olonkho. Leur spiritualité est fortement marquée par
le chamanisme et le culte de la nature. Traditionnellement, les Iakoutes
vivent de l'élevage (surtout des chevaux et des rennes) et de la chasse,
bien qu'ils pratiquent également un peu d'agriculture en été. En raison
des hivers rigoureux, avec des températures qui peuvent descendre jusqu'Ã
-60 °C, leur mode de vie s'adapte au froid extrême. Leurs habitations
et vêtements sont conçus pour résister aux températures les plus basses.
Les Evenks.
Les Evenks,
autrefois appelés « Toungouses », habitent une grande partie de la Sibérie,
s'étendant des régions proches du lac Baïkal jusqu'aux rives de l'océan
Arctique. Ce groupe est semi-nomade et possède une riche tradition de
déplacement. Les Evenks parlent l'evenk, une langue toungouse, mais beaucoup
d'entre eux parlent aussi le russe. Leur culture traditionnelle repose
sur le chamanisme et les croyances animistes, où la nature joue un rôle
central. Ils sont historiquement éleveurs de rennes, chasseurs et pêcheurs,
un mode de vie qui les amène à se déplacer fréquemment en fonction
des saisons et des migrations animales. Leur habitat mobile, notamment
le choum (tente en peau de renne), leur permet de s'adapter à la vie nomade
dans les zones boisées et la toundra.
Les Evenes.
Les Evenes, parfois
appelés Lamut, sont également une population de langue toungouse. Ils
vivent principalement dans l'Extrême-Orient russe, en particulier dans
la région de la Kamtchatka, la Tchoukotka et dans les régions de la mer
d'Okhotsk. Les Evenes ont une tradition chamanique et un système de croyances
animistes. Leurs chants et poèmes sont également un aspect important
de leur patrimoine culturel. Traditionnellement, les Evenes sont chasseurs,
pêcheurs et éleveurs de rennes. Leur mode de vie semi-nomade est similaire
à celui des Evenks, avec des déplacements en fonction des migrations
des animaux et des saisons. La chasse aux mammifères marins est aussi
une pratique importante pour ceux qui vivent près des côtes.
Les Nénets.
Les Nénets vivent
principalement dans la péninsule de Yamal, la région de la mer de Kara
et le nord de la Russie européenne. Ils font partie des peuples samoyèdes,
et leur présence dans l'Arctique russe remonte à des millénaires.
Ils parlent le nénètse, une langue de la famille ouralienne, bien que
le russe soit également couramment parlé. Leur culture repose sur le
chamanisme, avec des croyances animistes qui vénèrent les esprits de
la nature. Leurs traditions orales et leurs chants occupent une place importante
dans leur culture. Les Nénets sont avant tout éleveurs de rennes et nomades.
Ils se déplacent avec leurs troupeaux sur de vastes étendues, de la toundra
jusqu'à la taïga, en fonction des saisons. Leurs habitations, les tchoums(tentes
en peau de renne), sont faciles à monter et démonter, favorisant ainsi
leur mode de vie itinérant.
Les Khantys.
Les Khantys vivent
principalement dans la région de l'Ob et de l'Oural, en Sibérie occidentale,
où ils sont établis depuis des siècles. Ils sont originellement des
populations finno-ougrienness. Les Khantys parlent la langue khanty, qui
appartient à la famille ouralienne. Leur culture est fortement influencée
par le chamanisme et des croyances animistes, avec des cérémonies pour
honorer les esprits de la forêt, des rivières et des montagnes. Traditionnellement,
les Khantys pratiquent la chasse, la pêche et, dans certaines régions,
l'élevage de rennes. Bien que certains soient sédentarisés, d'autres
continuent de mener une vie semi-nomade. Ils utilisent des bâtiments en
bois sur pilotis pour leurs habitations permanentes, en raison des terrains
marécageux de la taïga. Aujourd'hui, une partie de leur territoire chevauche
des zones d'extraction pétrolière et gazière, ce qui affecte leur environnement
et mode de vie.
Les Mansis.
Les Mansis, cousins
des Khantys, vivent principalement dans le district autonome des Khantys-Mansis,
en Sibérie occidentale. Comme les Khantys, ils sont d'origine finno-ougrienne,
liés linguistiquement aux peuples ouraliens. La culture mansi est également
marquée par le chamanisme et un système de croyances animistes, avec
un fort respect pour les esprits de la nature. Les cérémonies chamaniques
et les récits épiques font partie intégrante de leur patrimoine culturel.
Les Mansis sont historiquement chasseurs et pêcheurs, avec une pratique
limitée de l'élevage de rennes par rapport aux Nénets. La taïga marécageuse
de leur territoire exige un mode de vie adapté, avec des habitations construites
sur des plateformes pour éviter les inondations saisonnières. L'influence
moderne, comme l'industrialisation de leurs terres pour l'exploitation
du pétrole et du gaz, a eu des répercussions significatives sur leur
mode de vie et leurs ressources naturelles.
Les Tchouktches.
Les Tchouktches
vivent principalement dans la péninsule de Tchoukotka, au nord-est de
la Russie, près du détroit de Béring. Leur histoire remonte à plusieurs
millénaires, et ils entretiennent des liens culturels avec les populations
inuit de l'Alaska. Les Tchouktches parlent le tchouktche, une langue appartenant
à la famille tchouktcho-kamtchatkienne. Leur culture est centrée sur
des traditions animistes et chamaniques, où les esprits de la nature jouent
un rôle important. Les Tchouktches possèdent une riche tradition orale,
incluant des chants, des récits et des légendes. Les Tchouktches se divisent
traditionnellement en deux groupes selon leur mode de subsistance :
• Les
Tchouktches éleveurs de rennes, qui mènent une vie nomade dans les
terres intérieures et se déplacent en fonction des besoins de leurs troupeaux.
• Les Tchouktches
côtiers, qui vivent près de la mer et se consacrent principalement
à la chasse aux mammifères marins, tels que les phoques et les baleines.
Leur habitat traditionnel
est le yaranga, une tente en peau de renne ou de phoque, adaptée
au climat froid et aux déplacements fréquents. Aujourd'hui, certains
Tchouktches continuent ce mode de vie traditionnel, tandis que d'autres
se sont installés dans des villages permanents.
Les Koriaks.
Les Koriaks vivent
principalement dans le district autonome de Koriakie, dans la région de
Kamtchatka et certaines parties de la Tchoukotka. Ils partagent des liens
linguistiques et culturels avec les Tchouktches et d'autres populations
de la région de Kamtchatka. Les Koriaks parlent le koriak, également
de la famille tchouktcho-kamtchatkienne. Comme les Tchouktches et les autres
populations sibériennes, leur culture est marquée par des traditions
chamaniques et animistes. Les rites chamaniques, les chants et les danses
jouent un rôle central dans leur culture, et leurs légendes sont souvent
liées aux esprits de la nature et des animaux. Les Koriaks, comme les
Tchouktches, peuvent être divisés en deux groupes :
• Les
Koriaks éleveurs de rennes, qui mènent une vie semi-nomade et migrent
avec leurs troupeaux de rennes à travers les régions de la toundra et
de la taïga.
• Les Koriaks
chasseurs et pêcheurs côtiers, qui vivent près de la côte de la
mer de Béring et pratiquent la chasse aux mammifères marins, la pêche
et la cueillette.
Leurs habitations peuvent
être des tentes en peau de renne ou des maisons en bois dans les villages
permanents. Les Koriaks côtiers fabriquent traditionnellement des vêtements
et outils en utilisant les os, les peaux et les tendons des animaux marins.
 |
En
librairie -
John Dundas Cochrane,
Récit d'un voyage à pied à travers la Russie
et la Sibérie tartare, de la mer de Chine au Kamtchatka, Ginkgo, 2002.
- Comte Henry Russell,
16 000 lieues à travers l'Asie et l'Océanie,
t. 1 : Sibérie, Mongolie, Chine, Colonies australiennes, Princi Neguer,
2002.
Peuples
du Monde, Mongolie, Sibérie, Mandchourie, L'Adret, 2000. - Myriam
Kissel, Un été en Sibérie, Société des écrivains, 2000. -
Charles Wenyon, A travers la Sibérie par la route de la malle-poste,
Olizane, 2000. -Antoine Garcia et Yves Gautier, L'exploration de la
Sibérie, Actes Sud, 1999.
- Zoya
Abramova, L'art paléolithique d'Europe occidentale et de Sibérie,
Jérôme Millon, 1998. - Collectif, La Sibérie, La Documentation
française, 1997. - Theodor Kröger, Le village oublié, bagnard en
Sibérie (1914-1919), Phébus, 1997. - Françoise Hugier et Gérard
Lefort, En route pour Behring, notes de voyage en Sibérie, Maeght,
1994. - A. Max, Sibérie, ruée vers l'Est, Gallimard, 1976.
Fedor
Dostoievski, Carnet de Sibérie,
L'Herne, 1996. - Maurice-Auguste Beniowski,
Mémoires et Voyages (3 tomes, trad. du polonais par Eric Morin-Aguilar),
Editions Noir sur Blanc, 1999.
- Sibérie
légendaire (Niourgoun le Yakoute, guerrier céleste), CILF, 1990.
- Collectif, Contes de Sibérie, Gründ, 1980. - Collectif, Sibérie,
paroles et mémoires, Publications langues'O / Inalco (Slovo
vol 28-29). |
|
|