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Les
plus anciennes traces de présence humaine au Groenland
remontent à plus de 3000 ans av. J.-C. D'autres vagues de peuplement
ont suivi, dont l'origine et le devenir sont très mal connus. L'histoire
devient plus assurée avec les premiers établissements européens,
à peu près contemporains de l'arrivée des Inuit actuels
(Thuléens), qui remontent à 986 , c'est-à-dire à
la fondation de la première colonie par le Viking
Éric le Rouge
ou Eirik Raudé. Quelques années plus tard, Leif, fils d'Éric,
ayant fait un voyage en Norvège,
y fut reçu favorablement du roi Olaüs Trygveson, à qui
il peignit le Groënland des couleurs les plus avantageuse. Olaüs
venait de se faire chrétien, et était animé du zèle
le plus ardent pour répandre dans le Nord la religion qu'il avait
embrassée. Il retint Leif à sa cour pendant l'hiver, et fit
si bien, qu'il le persuada de se faire baptiser.
Au printemps, il
le renvoya au Groenland, accompagné d'un prêtre qui devait
l'affermir dans sa nouvelle foi, et tâcher de la faire recevoir à
la nouvelle nation. Éric fut d'abord très offensé
de ce que son fils avait abjuré le culte de ses pères; mais
il s'apaisa enfin; et le missionnaire, aidé de Leif, ne tarda pas
même à lui faire adopter, ainsi qu'à toute la colonie,
le christianisme.
Avant la fin du Xe siècle, il y
eut déjà des églises au Groënland; on érigea
même un évêché dans la nouvelle ville de Gardar,
la principale du pays, et où les Norvégiens allèrent
longtemps commercer. Peu de temps après, les Groenlandais se multipliant,
on fonda une autre petite ville nommée Albe, et un cloître
en l'honneur de saint Thomas. On connut aussi ces colonies sous les
noms d'Eystribygd et Vestribygd. Elles étaient toutes deux sur la
côte occidentale, séparées par un espace inoccupé
(Ubygder).
La population prospéra
rapidement, sous la protection du roi de Norvège,
Olaf; encore d'autres églises s'y élevèrent, et un
évêque s'y établit, à Gardar, près de
Brattahild (1126). Les colons avaient du bétail, des chevaux et
vivaient aussi de pêche et de chasse. Leur nombre s'élevait,
croit-on, à environ 10 000. L'Eystribygd comprenait, au XIIIe
siècle, 12 églises et 190 établissements
; le Vestribygd, 4 églises et 90 établissements. Les Groenlandais,
qui reconnaissaient les rois de Norvège pour leurs souverains, et
leur payaient un tribut annuel, voulurent inutilement s'affranchir de cet
impôt en 1261. Ces colonies déclinèrent à partir
du XIVe siècle et disparurent au
XVe. Les causes de la ruine de cette première
colonie groenlandaise furent la peste noire
(1348) qui fit périr une grande partie de la population, l'interdiction
du commerce privé, édictée par le gouvernement danois,
et probablement aussi un refroidissement du climat. A la fin du XIVe
siècle, les Inuit détruisirent les établissements
du Vestribygd; en 1418, des pirates anglais saccagèrent ceux de
l'Eystribygd. Le souvenir seul des colonies subsista.
A plusieurs reprises,
les rois du Danemark
envoyèrent des expéditions pour la rechercher, lorsque la
découverte de l'Amérique
eut popularisé l'idée d'un passage du Nord-ouest. On cherchait
la colonie sur le littoral oriental, ou on ne trouva rien. On trouvera
ailleurs (L'exploration de l'Arctique
) le récit des explorations successives qui renouvelèrent
la connaissance du Groenland, jusque dans les premières décennies
du XXe siècle. Alfred Wegener,
le promoteur de l'idée de la dérive des continents mourut
au Groenland lors de l'une de ces explorations, en 1930.
La pêche de
la baleine attira de nouveau les marins européens dans ces parages.
La seconde colonisation du Groenland fut l'oeuvre du missionnaire Hans
Egede.
Il fonda la colonie de Godthaab (auj. Nuuk) (1721); ses missions se maintinrent,
tandis que la colonie pénitentiaire fondée par le gouvernement
(1728) échouait. Le commerce concédé à une
compagnie en 1750, puis organisé ainsi qu'il a été
dit ci-dessus en 1782, prit une certaine extension. Le déclin de
la pêche de la baleine l'a fait rétrograder.
Pendant la Seconde
Guerre mondiale, des stations météorologiques ont été
construites le long de la côte orientale du Groenland. La position
stratégique de l'île a ensuite été mise à
profit au cours de la Guerre froide, avec la construction, à partir
de 1951, par les États-Unis
d'une grande base aérienne, du nom de Thulé, dans le Nord-Ouest.
Jean Malaurie a témoigné des effets brutaux de cette irruption
sur les populations de la région (Les
Derniers rois de Thulé, coll. Terre humaine, Plon, 1955). Un
réseau de radars sur l'inlandsis s'est ajouté à la
base vers la même époque. Restée colonie du Danemark
jusqu'en 1953, le Groenland est devenue à cette date part intégrante
du royaume danois. Il a rejoint la Communauté européenne
(aujourd'hui Union européenne) en 1973, mais s'en est retiré
en 1985, à la suite de conflits au sujet des quotas de pêche
jugés trop contraignants.. Entre-temps, le Groenland avait été
doté, en 1980, d'un gouvernement autonome (après une loi
votée par le parlement danois l'année précédente).
Le Groenland a voté
en faveur d'une autonomie accrue en novembre 2008 et a acquis une plus
grande responsabilité en matière d'affaires intérieures
lorsque la loi sur l'autonomie du Groenland a été promulguée
en juin 2009. Le Danemark a toujours en charge la politique étrangère
et la Défense du Groenland, et garde aussi le controle sur sa politique
financière, conjointement avec le gouvernement autonome du Groenland.
(A. M. B.).
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Robert
Gessain, Inuit,
Images d'Ammassalik (Groenland 1934-1936), La Martinière
Beaux Livres, 2007.
2732435716
En
1934, Robert Gessain a 26 ans lorsqu'il rencontre à l'Institut d'ethnologie
Paul-Emile Victor et qu'il se joint à l'expédition du commandant
Charcot sur le Pourquoi-Pas? Cette découverte de l'Arctique
est pour lui déterminante. Avec Paul-Emile Victor, Fred Matter et
Michel Pérez, il séjourne à Ammassalik, au Groenland,
où il retournera à plusieurs reprises jusqu'en 1972. Médecin
et anthropologue, il réalise aussi de nombreuses photographies.
Présentées pour la première fois dans cet ouvrage,
ses images, remarquables autant par leur qualité plastique que par
leur nombre - plus de 8000 -, témoignent de sa profonde admiration
pour ces hommes à la fois chasseurs, religieux et poètes.
Dans sa préface, Yves Coppens rend hommage au grand humaniste que
fut Robert Gessain, pionnier de l'anthropologie arctique, dont les photographies
constituent un document bouleversant sur "ces grandes civilisations du
froid, établies contre vents et glaciers tout autour du Grand Pays
vert". (couv.).
Chloé
Cruchaudet, Groenland
/ Manhattan, Delcourt-Mirages, 2008. - Groenland
- Manhattan ou les désastres causés par l'idéologie
raciste de l'anthropologie naissante au XIXe siècle. Chloé
Cruchaudet retrace l'histoire vraie d'un jeune "Esquimau" déraciné,
exhibé avec sa famille comme des fossiles vivants... Un destin dramatique
superbement mis en image. L'histoire : 1897. L'explorateur Robert Peary
regagne New York après une mission au Groenland et ramène
dans ses bagages cinq "Esquimaux", parmi lesquels Minik, un garçon
de dix ans, et son père. Véritable objet de curiosité,
le petit groupe est logé dans les sous-sols du Museum d'histoire
naturelle. Mais, en l'espace de quelques mois, la tuberculose a raison
de ces grands hommes du Nord et seul Minik survit. Adopté par l'un
des conservateurs du Museum, il s'adapte peu à peu à sa nouvelle
destinée. Mais sa vie bascule le jour où il découvre
dans une vitrine du musée le squelette de son père... (couv.). |
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