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La
souveraineté temporelle des papes ne remonte pas à une époque précise,
et leur domaine territorial ne s'est formé que très lentement. La prétendue
donation de Constantin, inventĂ©e Ă
la fin du VIIIe
siècle par le prêtre espagnol Isidore
Mercator, déjà contestée au commencement du XIIe
par les bénédictins de la Sabine,
et démontrée fausse vers le milieu du XVe
par Laurent Valla, n'est plus soutenue depuis longtemps
par personne, même parmi les auteurs ecclésiastiques. Les donations de
PĂ©pin le Bref et de Charlemagne,
qui ne sont Ă©tablies par aucun titre authentique, pourraient, au mieux,
avoir été de simples concessions verbales. Si les rois francs gratifièrent
les papes d'une autorité temporelle qui fut généralement reconnue, ils
ne leur attribuèrent pas une véritable souveraineté. Celle-ci fut le
résultat d'un long travail d'influence et d'usurpation qui occupa tout
le Moyen âge .
C'est seulement Ă l'ouverture des temps modernes qu'on voit le souverain
pontife exercer son autorité au même titre que les souverains laïques
et qu'on trouve les États de l'Église
constitués.
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La fausse
donation de Constantin
Tandis
que la papauté se débat péniblement au milieu des difficultés que lui
crée sa souveraineté temporelle, elle en fabrique les titres : ayant
le fait, elle veut procurer le droit. Elle le tire de la prétendue donation
que l'empereur Constantin aurait fait au pape Sylvestre et dont voici le
sens.
Quatre
jours après son baptême, Constantin, « empereur de la terre, gouvernant
le peuple universel répandu sur l'univers », a résolu de donner un privilège
à l'église de la ville de Rome où « le principat des évêques et la
tête de la religion chrétienne ont été établis par l'empereur du ciel
».
Il
concède au pape la puissance et les honneurs impériaux, son palais de
Latran, son diadème, le bonnet phrygien, le superhuméral, la chlamyde
de pourpre, la tunique écarlate et tous les vêtements impériaux, le
sceptre impérial, tous les insignes et ornements, toute la pompe de la
sublimité impériale.
Il
prend sur sa propre tĂŞte, pour la donner Ă Sylvestre sa couronne d'or
pur et de pierres précieuses. Il veut que la cour pontificale ait des
chambellans, des portiers, des gardes et tous les offices qui rehaussent
la puissance impériale.
Quant
au clergé de la ville, il brillera de la même glires que le « sénat
amplissime » : les prêtres romains porteront sandale blanche, comme les
sénateurs, et leurs chevaux couverture blanche. Le clergé des provinces
sera paré des mêmes dignités que la milice des officiers impériaux.
Constantin
ne se contente pas d'assurer au chef et aux membres de l'Église des honneurs
égaux à ceux du chef et des membres de l'Empire. Il déclare que le siège
du bienheureux Pierre « doit être élevé au-dessus du trône terrestre
». Pour témoigner sa révérence envers l'apôtre, il a tenu la bride
du cheval de Sylvestre et fait l'office d'Ă©cuyer pontifical. Dans le partage
du pouvoir, il s'est réservé le moindre lot, car l'autorité spirituelle
du pape s'étend sur tout l'univers, et l'empereur lui a cédé la moitié
du monde temporel :
«
Nous lui avons donné, avec notre palais, la ville de Rome et les lieux
et cités de l'Italie et de l'Occident ».
Les documents
faux sont, précieux. Ils nous apprennent. mieux que les faits, des intentions
qui Ă©clairent parfois toute l'histoire.
Quel
chemin l'Église a parcouru, de l'Évangile à la Fausse Donation!
Il
est remarquable qu'au moment où il affichait de si hautes prétentions
le pape ne pût même être maître à Rome. L'Empire auquel il prétend
sur l'Italie et l'Occident, il ne pourra que le concéder au roi des Francs. |
Moyen âge.
Le titre de pape
( = père) n'impliquait d'abord aucune supériorité : il était commun
Ă tous les Ă©vĂŞques, voire Ă tous les prĂŞtres. Mais, capitale de l'Empire,
la ville de Rome devait assurer une certaine prééminence à l'évêque
dont elle était le siège, lors même qu'il n'eût pas été considéré
comme le successeur de saint Pierre, qui, d'après une tradition au moins
douteuse, serait venu Ă Rome et y aurait subi le martyre, et dont on admettait
la primauté entre les apôtres .
En 381,
l'empereur Gratien donna Ă l'Ă©vĂŞque de Rome
le droit de juger les différends survenus entre les autres évêques;
la même année, le concile
de Constantinople reconnut implicitement
la suprématie de celui qu'on appelait le patriarche d'Occident : elle
fut admise aussi par le concile de Chalcédoine .
Les invasions des barbares, favorables à l'accroissement de l'autorité
morale de l'épiscopat, grandirent particulièrement celle des pontifes
de Rome. Élus par les fidèles comme par le clergé, ils devinrent naturellement
les défenseurs du peuple dans ces temps de confusion. Le pape Léon Ier,
envoyé par l'empereur Valentinien III
auprès d'Attila qui menaçait Rome, parvint Ă
l'Ă©loigner par la promesse d'un tribut (452).
Après la disparition
des empereurs d'Occident (476),
les papes servirent d'intermédiaires entre la population et les rois barbares
revêtus par les empereurs d'Orient de dignités romaines. Quand Justinien
eut rattaché de nouveau l'Italie
Ă l'Empire
(554),
enrichis par les vastes possessions qu'ils devaient à la piété des fidèles,
ils prirent, sous les patrices ou exarques byzantins, une importance encore
plus considĂ©rable. Le siège de l'exarchat ayant Ă©tĂ© transfĂ©rĂ© Ă
Ravenne au moment de la conquĂŞte lombarde (568),
le prestige du pape éclipsa bientôt celui du duc impérial qui régissait
Rome avec le territoire s'Ă©tendant de Viterbe Ă Terracine et de Narni
Ă la mer. C'est ce que l'on appela plus tard le Patrimoine de saint Pierre.
Grégoire Ier,
dit le Grand (590-604),
qui fut le véritable organisateur de l'Église romaine, traitait directement
avec les Lombards.
L'Ă©dit iconoclaste de l'empereur LĂ©on l'Isaurien (726),
repoussé par le pape Grégoire II, fut l'occasion
de la révolte qui détacha de l'empire la plupart des dernières provinces
italiennes. Rome fit revivre ses anciennes institutions républicaines
et décerna au pape le titre de Père de la République romaine.
Menacés sans cesse
par les Lombards, les papes recherchèrent l'appui des Francs. Pépin
le Bref, sacré roi des Francs par Étienne
II et institué par lui patrice de Rome, dignité déjà offerte par
Grégoire III à Charles
Martel, passa deux fois les Alpes pour réprimer les tentatives des
rois lombards. Usant de son droit de conquête, il abandonna au saint-siège
apostolique et à la république romaine vingt-deux cités de l'exarchat
de Ravenne et de la Pentapole, mais en conservant comme patrice la principauté
politique (756).
De nouvelles entreprises des Lombards amenèrent en Italie-Charlemagne,
qui mit fin Ă leur domination, joignit Ă son titre de roi des Francs
celui de roi des Lombards, et, revĂŞtu aussi par le pape Adrien
Ier
de la dignité de patrice, renouvela l'abandon fait par son père au saint
siège, sans renoncer non plus à ses droits de souveraineté (774).
Ravenne et Rome figuraient au nombre de ses villes métropolitaines : il
examinait et confirmait l'Ă©lection des papes. En 781,
il fit sacrer son second fils, PĂ©pin, roi
d'Italie. Enfin, le jour de Noël
de l'an 800,
dans la basilique de Saint-Pierre, le pape LĂ©on III couronna Charlemagne
empereur des Romains. Le nouvel empereur d'Occident, tout en augmentant
l'autorité du chef de l'ÉgIise, garda le gouvernement réel de la chrétienté.
La puissance temporelle
des papes, mal définie, ne résista pas à l'anarchie qui entraîna la
dissolution de l'empire carolingien .
Leur Ă©lection, Ă partir d'Adrien II (867),
fut réservée au clergé : le peuple, qui ne faisait plus que l'agréer,
ne montra plus le même dévouement. L'archevêque de Milan,
rival du pontife romain, s'arrogeait le droit de conférer la couronne
d'Italie .
L'archevêque de Ravenne, méconnaissant les fameuses donations, prétendait
jouir en Romagne du mĂŞme pouvoir que le pape Ă Rome. Les seigneurs italiens,
dans leurs guerres incessantes, agrandissaient leurs possessions, aux dépens
de celles de l'Église. Au siège même de la papauté, les barons romains
se disputaient violemment la prépondérance. Le saint-siège devint la
proie des factions. Le pape Étienne VI (896),
qui fit exhumer le pape Formose pour lui faire son procès, périt lui-même
étranglé dans un cachot. Des femmes, les deux Théodora et Marosie, disposèrent
à leur gré du pontificat (903-931).
En 962,
la restauration de l'Empire au profit d'Othon le Grand, roi de Germanie,
que le pape Jean XII avait appelé contre Bérenger
II, roi d'Italie ,
fit passer le saint-siège et l'Italie presque entière sous la domination
allemande .
Rome essaya vainement de faire revivre la république : le consul Crescentius
paya de sa vie cette tentative (998).
Le moine Hildebrand (le futur Grégoire VII),
tout-puissant à la cour pontificale dès 1049,
entreprit d'abord la réforme ecclésiastique pour affranchir ensuite l'Église
de sa sujétion à l'Empire. Entre-temps, les chefs normands de l'Italie
méridionale consentaient à tenir leurs possessions comme des fiefs de
saint Pierre; ils aidaient le pape à s'emparer de Bénévent ,
que l'empereur Henri III voulut bien Ă©changer
contre quelques domaines ou redevances au delĂ des Alpes (1053).
En 1059,
Nicolas Il décida que le pape serait élu par les cardinaux ,
c.-à .-d. par les titulaires des évêchés suburbicaires et des paroisses
principales de Rome, et que le clergé inférieur donnerait seulement son
approbation comme le peuple.
Élu pape en 1073
sous le nom de Grégoire VII, Hildebrand
poursuivit sa réforme, anathématisa les prêtres mariés et les simoniaques,
interdit à tout laïque de donner l'investiture de biens ou de dignités
ecclésiastiques, et à tout clerc de la recevoir d'un laïque. C'était
abolir le droit de confirmer l'élection des papes exercé jusque-là par
l'empereur, confirmation que Grégoire VII avait pourtant demandée pour
lui-mĂŞme. La querelle des investitures fut le signal de la lutte entre
le sacerdoce et l'Empire .
Le pape, au nom de l'autorité spirituelle, s'érigea en juge souverain
des puissances temporelles. L'humiliation de l'empereur Henri
IV à Canossa porta le pouvoir du saint-siège à son apogée (1077).
Mais, malgré l'appui de la comtesse Mathilde,
maîtresse de l'Italie
centrale, Grégoire VII, combattu par les seigneurs voisins et par ses
propres sujets, assiégé dans Rome par l'empereur, sauvé par les Normands
pour devenir leur proie, mourut en exil Ă Salerne, victime de son rĂŞve
de théocratie (1085).
La donation que la comtesse Mathilde avait faite au saint-siège de tous
ses États n'eut aucun effet à sa mort (1115).
Les transactions qui mirent fin Ă l'affaire des investitures et Ă celle
de l'héritage de Mathilde ne profitèrent au fond qu'aux villes italiennes,
qui à la faveur de ces querelles féodales, purent conquérir leurs libertés.
Arnaud de Brescia porta la révolution jusque
dans l'enceinte de Rome.
La république romaine,
rétablie en 1141,
ne fut étouffée que par les Allemands
de Frédéric Barberousse, qui, après le supplice d'Arnaud,
reçut la couronne impériale (1155).
Le pape Alexandre lII enleva au pontificat
toute trace de son origine populaire en supprimant l'intervention du clergé
inférieur et des fidèles dans l'élection des papes (1159).
La lutte recommença bientôt entre le saint siège et l'Empire, mais dominée,
cette fois, par des vues politiques plutĂ´t que religieuses. Alexandre
III se proclama le protecteur de la Ligue lombarde contre Frédéric Barberousse
(1168-1177).
Innocent III (1198)
reprit les traditions théocratiques de Grégoire
VII. Il employa les armes spirituelles pour s'imposer en maître aux
royaumes, s'immisça en Allemagne dans les querelles de succession à l'Empire,
se déclara d'abord en faveur des Guelfes, recouvra avec leur appui une
partie des domaines du saint-siège, puis releva la fortune des Gibelins,
et mourut en laissant la chrétienté livrée aux plus grandes agitations
(1216),
La lutte continua avec violence entre son successeur Grégoire
IX et l'empereur Frédéric II. L'extinction de la maison de Souabe
amena enfin la chute de la domination allemande (1254).
La papauté avait
usé ses forces à vouloir établir sa suprématie. Urbain IV crut la raffermir
en l'appuyant de nouveau sur l'Ă©tranger. La maison d'Anjou ,
appelée par lui à Naples et en Sicile (1263),
consomma au contraire l'affaiblissement du saint-siège. Grégoire
X, l'organisateur des conclaves ,
reçut en France
le Comtat-Venaissin
(1274),
mais Boniface VIII eut Ă subir les outrages
de Philippe le Bel. En 1305,
le roi de France fit Ă©lire pape l'archevĂŞque de Bordeaux,
qui fut Clément V. Celui-ci fixa son séjour
à Avignon (1309), que Clément
VI acheta plus tard Ă Jeanne de Naples (1348).
Sept papes légitimes y résidèrent, tous Français. Rome, abandonnée
par les papes, tomba dans l'anarchie. Le tribun Nicola Rienzi tenta vainement
de la relever en lui restituant les vieilles formes du gouvernement républicain
sous le nom de Bon-Etat (1347-1354).
Urbain V fit une courte apparition Ă Rome (1368).
Grégoire XI vint seulement y mourir (1378).
Sa mort amena le grand schisme d'Occident. Rome eut son pape et Avignon
le sien. La supériorité des conciles généraux sur les papes, proclamée
par les conciles de Constance et de Bâle ,
facilita le rétablissement de l'unité, effectué en 1449
par Nicolas V au profit de Rome. La nouvelle tentative républicaine de
Porcari n'aboutit qu'au supplice de son auteur (1453).
Temps modernes.
L'ascendant des
papes, si grand pendant certaines périodes du Moyen âge ,
alors que leur puissance temporelle était encore précaire, ne fit que
s'amoindrir dans les temps modernes, quand leur principauté politique
fut définitivement assise. Le souverain pontife, toujours Italien à partir
du XVIe
siècle, sembla perdre de son caractère
universel en devenant le chef d'un État qui avait ses intérêts particuliers.
Les États de l'Église se composaient alors du Patrimoine de saint Pierre,
d'une partie du duché de Spolète, des Marches et de la Romagne, et des
dépendances de Bénévent et d'Avignon.
Avec Sixte IV (1471)
commencent le népotisme et la préoccupation presque exclusive des intérêts
temporels. Alexandre VI avait acheté
les suffrages des cardinaux
(1492)
: puissamment secondé par son fils César Borgia,
qui détruisit les seigneuries indépendantes de la Romagne, il s'agrandit
par la conquĂŞte, l'intrigue et la terreur. Jules II (1503),
qui réunit Pérouse et Bologne
à ses États, joua un rôle considérable dans la politique européenne.
Léon X (1513) s'empara du duché d'Urbin,
de Pesaro, de Sinigaglia, s'unit Ă Charles-Quint
contre François Ier,
mais s'illustra surtout comme protecteur des lettres et des arts.
Par la vente des
indulgences, LĂ©on X donna lieu au mouvement de la RĂ©forme, qui finit
par détacher de l'Église romaine une partie de l'Europe. Le Hollandais -Adrien
VI (1522),
ancien précepteur de Charles-Quint, fut
le dernier pape étranger, Clément VII (1523)
se tourna contre Charles-Quint, vit Rome assiégée et pillée par les
bandes du connétable de Bourbon (1527),
dut consentir à la restauration du pouvoir impérial en Italie ,
et couronna Charles-Quint Ă Bologne (1529).
Sous la domination espagnole, les questions religieuses reprirent le dessus
pour quelque temps. Paul III (1534),
effrayé des progrès de la Réforme, s'efforça de relever la papauté
spirituelle, approuva l'institution de l'ordre des jésuites
(1540),
et réunit le concile de Trente
(1545),
qui, à travers diverses péripéties, se prolongea sous ses successeurs
jusqu'en 1563.
Grégoire XIII (1572)
approuva la Saint-Barthélemy et soutint les princes ennemis du protestantisme .
Il réveilla les anciennes factions dans ses États par les mesures violentes
qu'il prit pour se procurer de l'argent. C'est à lui qu'on doit la réforme
grégorienne du calendrier
(1582).
Sixte-Quint (1585),
plus soucieux de ses devoirs envers ses sujets, prit à tâche de réprimer
le brigandage et d'améliorer l'administration. Clément
VIII (1592)
réunit Ferrare aux domaines du saint-siège
(1598).
Urbain VIII (1623)
compléta la formation du territoire pontifical en prenant définitivement
possession du duché d'Urbin
(1633).
Les États de l'Église,
à peine complétés, étaient déjà dans des conditions bien inférieures
à celles des autres États italiens .
Rome, centre du catholicisme ,
avait sans doute la pompe du culte, l'Ă©clat de ses souvenirs et de ses
monuments; Bologne, plus rapprochée des États modernes, devait un certain
lustre à sa vieille université; Ancône
conservait quelque commerce avec l'Orient, mais les autres villes Ă©taient
ruinées, les campagnes négligées, les populations écrasées d'impôts,
la dette du trésor papal considérable, et l'ignorance, la misère, l'insécurité
devenaient générales. Depuis lors, la décadence ne s'arrêta plus. Dans
l'ordre temporel, la papauté dut, sous Alexandre
VII, faire humblement amende honorable Ă Louis
XIV (1664),
et, sous lnnocent XI, subir un nouvel affront
du roi très chrétien (1687).
Dans l'ordre spirituel, elle fut occupée pendant près d'un siècle de
l'interminable affaire du jansénisme .
Vint ensuite celle des jésuites ,
dont Clément XIV, cédant aux instances des
puissances catholiques, se décida à prononcer la suppression (1773).
Pie VI (1775),
qui avait eu déjà à lutter, sur le terrain spirituel, contre les empiétements
du ministre Tanucci à Naples, de l'empereur Joseph Il dans les États
autrichiens ,
du grand-duc LĂ©opold Ier, en Toscane,
se trouva enfin aux prises avec la Révolution française (1789).
La confiscation des
biens ecclésiastiques, la constitution civile du clergé, l'occupation
d'Avignon et du Comtat-Venaissin
(1791),
déterminèrent le pape à se joindre aux ennemis de la France .
Les États de l'Église, travaillés par les idées nouvelles, s'agitèrent
à l'approche des armées françaises. Les légations de Bologne,
de Ferrare et de Ravenne, qui s'en Ă©taient
détachées en 1796
furent cédées par le pape, obligé de souscrire au traite de Tolentino,
et réunies à la République cisalpine
(1797).
La RĂ©publique romaine, Ă©tablie en 1798,
fut de courte durée. Pie VII (1800),
qui conclut le concordat avec Bonaparte (1801),
et le sacra empereur (1804),
ne tarda pas Ă se brouiller avec lui. En 1806,
il perdit Bénévent et Porto Corvo; en
1808,
les provinces des Marches, rattachées au royaume d'Italie ;
en 1809,
le reste du territoire pontifical, converti en départements français.
Rome fut déclarée la seconde ville de l'Empire.
Exilé à Savone,
Pie VII rentra à Rome après la chute de Napoléon
(1814).
Le Congrès de Vienne
lui rendit tous ses États, moins la partie du Ferrarais
située sur la rive gauche du Pô, que l'Autriche
s'attribua avec le droit d'entretenir des garnisons Ă Ferrare et Ă Comacchio.
Le pouvoir temporel des papes, restauré dans toute son intégrité, s'exerça
dans des conditions encore plus déplorables qu'auparavant. Le cardinal
Consalvi, secrétaire d'État, eut grand-peine à modérer la réaction.
LĂ©on XII (1823)
la déchaîna. Le sanfédisme, secte austro-papaline, se livra impunément
à d'abominables excès. Le Carbonarisme,
société secrète libérale, s'exaspéra
de son côté. Les confiscations, les incarcérations, les supplices étaient
les seuls moyens de gouvernement. Sous Pie VIII (1829),
le mal ne fit qu'empirer. Les conspirations devinrent permanentes. Le saint-siège
ne se soutenait qu'en s'inféodant à l'Autriche. A l'avènement de Grégoire
XVI (1831),
la révolution éclata à Bologne, dans les
Romagnes, dans les Marches et dans l'Ombrie. Elle fut étouffée par l'Autriche.
En vain la France
essaya de faire contrepoids Ă l'Autriche en occupant AncĂ´ne
(1832).
Quand les deux puissances évacuèrent le territoire pontifical (1838),
Ia situation morale et matérielle était toujours la même. En 1843
et 1844,
il y eut dans les Romagnes des mouvements après lesquels le pape sévit
plus que jamais. On sait quelles espérances fit naître l'exaltation de
Pie IX (1846),
et comment elles furent déçues.
Après les événements
de 1848
et la chute de la RĂ©publique romaine de 1849,
en dépit des promesses du pape restauré et protégé par Louis
Bonaparte, rien ne fut changé au régime. C'est à propos de la situation
politique des États de l'Église que la question italienne fut posée
officiellement au congrès de Paris (1856).
En 1859,
l'alliance franco-sarde et la défaite de l'Autriche
à Magenta eurent pour conséquence l'affranchissement de Bolognet
et des Romagnes.
Le mouvement gagna
les Marches. Il atteignait l'Ombrie, quand les gardes suisses du pape l'arrêtèrent
Ă PĂ©rouse par d'horribles massacres (20 et 21 juin). Le 22 mars 1860,
Bologne et les Romagnes, après un vote populaire presque unanime, furent
annexées au royaume de Victor-Emmanuel. La même année (4 novembre),
les Marches et l'Ombrie, soulevées lors de la campagne de Castelfidardo,
votaient aussi leur annexion. Rome, évacuée par les troupes françaises
après la convention du 15 septembre 1864,
les vit revenir pour protéger le pape contre l'expédition garibaldienne
qui Ă©choua Ă Mentana (3 novembre 1867).
Les garnisons laissées par le gouvernement impérial à Civittavecchia,
à Viterbe, et sur quelques autres points, ayant été rappelées en France
au début de la guerre avec la Prusse ,
les troupes italiennes
passèrent la frontière pontificale et entrèrent à Rome après une courte
canonnade, le 20 septembre 1870. Le 2 octobre, les populations votèrent
leur annexion, au royaume d'Italie, dont la capitale fut transfĂ©rĂ©e Ă
Rome au commencement de 1871.
Ainsi finit la souveraineté temporelle des papes, du moins telle qu'on
l'avait connue depuis près de mille ans. Elle ne renaîtra, sous une forme
nouvelle, qu'à partir du 11 février 1929,
à la suite des accords de Latran, conclus entre le Saint-Siège (représenté
par le pape Pie XI) et l'Italie (représentée par Mussolini), mais cette
fois, en ne s'appuyant plus que sur un État pontifical indépendant, mais
réduit à la simple cité du Vatican
: 44 hectares enclavées dans Rome (plus quelques annexes, tel le palais
d'été du Pape, à Castelgandolfo). (Félix Henneguy).
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Peter
Godman (trad. CĂ©cile Deniard), Hitler
et le Vatican, Librairie Académique Perrin, 2010.
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On
a longtemps reproché à l'Eglise catholique
son attitude face au nazisme. Pie XII, surnommé par ses adversaires le
"pape de Hitler", n'aurait pas encouragé les catholiques
à se rebeller, tout comme une partie des prélats, obsédés par leur
haine du communisme. Jusqu'à présent, ces
accusations ne se basaient sur aucune preuve concrète. Or, en février
2003, le Vatican a enfin ouvert ses archives
sur la période nazie. Peter Godman a été l'un des premiers historiens
à explorer ce nouveau fonds et ses révélations sont troublantes, parfois
surprenantes. A la suite du rapprochement entre Mussolini et Hitler, Pie
XII a choisi de reléguer la morale derrière
la diplomatie. Alors que l'écho des horribles persécutions pratiquées
par les nazis commence à retentir au Vatican, la voix du Saint-Siège
reste faible. Après la guerre, alors qu'il n'est plus possible de nier
l'Ă©vidence des crimes nazis, Pie XII n'aura qu'une seule explication Ă
offrir : "Dieu tout-puissant a Ses raisons. C'est Lui qui a souhaité ce
qui est arrivé." Par l'abondance et l'originalité de ses sources, Hitler
et le Vatican se pose comme une Ă©tude majeure, une oeuvre palpitante sur
les secrets les mieux gardés du Saint-Siège. (couv.). |
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