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L'histoire du Chili
Les premiers habitants du Chili appartiennent à deux populations distinctes, les Araucans ou Araucaniens, qui formaient encore au XIXe siècle un État indépendant  et les Puelches ou Huilliches, qui habitaient particulièrement les montagnes et se distinguent par leur taille élevée. Avant la conquête des Espagnols, le Chili avait été envahi par les Incas et faisait nominalement partie de l'empire du Pérou, mais sans avoir été soumis de fait. En 1536, Almagro, envoyé par Pizarro, pénétra dans ce pays, mais il essaya vainement de s'y maintenir. Valdivia, en 1540, tenta une nouvelle expédition; il fonda les villes de Santiago, de Concepcion et de Valdivia, mais fut défait et mis à mort par les Araucaniens (1550). 

L'Espagne néanmoins annexa le Chili à la vice-royauté du Pérou, mais des guerres continuelles avec les indigènes en retardèrent la soumission jusqu'en 1773. En 1810 le Chili secoua le joug de sa métropole et proclama son indépendance. Retombé un instant sous la domination espagnole en 1814, il s'insurgea en 1817 sous la conduite du général San Martin. La victoire de Maypo (avril 1818) assura son indépendance et le Chili s'érigea en république. Toutefois le nouvel Etat ne fut définitivement constitué qu'en 1826, par les efforts de Ramon Freire et d'O'Higgins. Son indépendance fut reconnue en 1844 par l'Espagne. 

De 1879 à 1883, lors d'une guerre, dite Guerre du Salpêtre, conduite contre la Bolivie, le Chili acquiert la province de l'Atacama (portion Nord du pays). Au cours des années 1920 des réformes sociales sont entreprises sous la présidence Alessandri. A parir de 1964, le gouvernement social-chrétien d'Eduardo Frei nationalise les mines détenues principalement par des sociétés américaines et initie une réforme agraire. En 1973, un coup d'Etat militaire, soutenu par l'oligarchie foncière et financière et aidé en sous-main par les Etats-Unis, via la CIA, a renversé le gouvernement de gauche de Salvador Allende. Une dictature sangunaire, dirigée par le général Augusto Pinochet s'installe. Cette junte militaire, qui a stoppé la poursuite des nationalisations et de la réforme agraire, s'est maintenue au pouvoir jusqu'en 1990, quand des élections ont enfin permi l'intallation d'un nouveau président ainsi que la mise en place progressive d'une démocratie pluraliste. 

Yupanqui, inca du Pérou, ayant appris qu'il existait un riche pays qu'on disait s'appeler Tchilé (Chili), en entreprit la découverte et la conquête que fit son général Chinchiruca (1410-1445). Le fleuve Maule devint la limite méridionale de l'empire des Incas. La conquête du Pérou par les Espagnols amena celle du Chili, qu'avait touché Magellan (à l'île du Chiloé), en 1520. Diego de Almagro partit de Cuzco (1535) ; il passa la Cordillère des Andes en avril et pénétra au Chili par la route dite encore de nos jours : Camino del Inca, au nord de Copiapo. Dans l'acte de prise de possession, il enjoignait aux principaux caciques de se reconnaître comme sujets et vassaux de son souverain. Almagro mort, Pedro de Valdivia lui succéda (octobre 1540); le 12 février 1542 il fonda Santiago de Nueva Estramadura, capitale actuelle du Chili, et plusieurs autres villes : La Serena, Conception, Valdivia, etc. Il fut vaincu par le fameux Araucan Caupolican (1553) et mis à mort. On prétend que les Indiens le firent périr en lui versant de l'or fondu dans la bouche en lui disant :
 « Rassasie-toi de cet or dont tu fus si affamé. »
Le vice-roi du Pérou, Hurtado de Mendoza, donna la succession de Valdivia à son fils don Garcia, qui réussit à vaincre les Araucans. Villagran succéda à don Garcia Hurtado de Mendoza, nommé vice-roi du Pérou en remplacement de son père. Sous le successeur du fils de François de Villagran, don Rodrigo de Quiroga, fut établie l'audiencia real du Chili (13 août 1567), conseil composé de quatre membres et d'un procureur ou fiscal, chargé de l'administration politique et militaire de la province. Cette audience royale, indépendante de celle du Pérou, fut installée d'abord à Concepcion; puis elle fut transférée en 1574 à Santiago.

En 1578 l'amiral anglais Drake vint livrer la ville de Valparaiso au pillage; sir Thomas Cavendish, qui tenta une nouvelle descente dans cette ville, en 1586, en fut repoussé. La guerre d'extermination contre les Araucans continua avec des alternatives de succès et d'insuccès. Sous l'administration de Alonso de Rivera (1600-1604), les Araucans détruisirent de fond en comble Villarica, Angol, l'Impériale, Valdivia, Santa-Cruz, Chillan et Conception. Un traité de paix (1640) fut signé à Quillen entre les Araucans et les Espagnols.

En 1600 l'amiral hollandais Olivier van Noort fit une descente sur les côtes du Chili pour y détruire l'influence espagnole. Il y remporta d'importants succès. Les Hollandais, commandés par Spilbergen, reparurent sur les côtes chiliennes en 1615. La paix de Quillen fut rompue en 1655. Les hostilités continuèrent sans interruption jusqu'en 1724, époque du traité de Negrete. De 1742 à 1746, don José de Manso fit élever les villes de Copiapo, Aconcagua, San Jose de Lagroño, Mellipilla, Rancagua, San Fernando, Curico, Talca, à l'effet de rassembler les Indiens soumis et de les gouverner plus aisément. En 1766, don Antonio Guilly Gonzaga, ayant voulu obliger les Araucans à se bâtir aussi des villes et à s'y retirer, la guerre éclata de nouveau. 

Les Araucans firent des prodiges de valeur sous la conduite de Curignancu qui imposa la paix aux Espagnols; les traités de Quillen et de Negrete furent rétablis et les Araucans eurent à Santiago un ambassadeur chargé de les représenter. En 1787, Ambroise O'Higgins, un des meilleurs administrateurs espagnols, était gouverneur général du Chili; il fut très regretté des Chiliens lorsqu'il fut appelé à la vice-royauté du Pérou

La période de 1810 à 1818 est celle de l'émancipation. Elle commença par l'acte d'indépendance du 18 septembre 1810. Elle comprend l'histoire des exploits des fondateurs de la République du Chili, parmi lesquels figurent les Carrera, Bernardo O'Higgins, San Martin, le vénérable don Manuel Blanco, l'amiral Cochrane. Le général O'Higgins conserva le pouvoir six ans (1817-1823). Le projet de constitution de 1814 et de la constitution de 1818 n'ayant pas satisfait la majorité du pays, le directeur général octroya la constitution de 1822. La guerre de l'indépendance terminée définitivement en 1826, le Chili put désormais consacrer toutes ses forces à son administration. La constitution de 1828 fut l'oeuvre du parti libéral; elle organisait pour la première fois la République; mais les conservateurs qu'il mécontenta réussirent à la remplacer par celle du 25 mai 1833. Cette constitution a valu au pays de longues années de paix et de travail. 

Les deux administrations que dirigea le général don Joaquin Pinto, de 1831 à 1841, développèrent les nouvelles institutions sans que la paix et la tranquillité publique eussent jamais été troublées. Elles organisèrent les finances publiques et le crédit national, en faisant apprécier le gouvernement du Chili dans ses relations extérieures.

Les deux présidences du général don Manuel Bulnes (1841-1851) qui venait de terminer avec succès la campagne du Pérou, se distinguèrent par l'ordre qu'elles apportèrent dans l'administration, par un esprit de franchise et une largeur de vues plus grandes que durant la période antérieure, par l'essor donné à l'instruction publique et par les travaux préparatoires à la codification de la législation civile. A cette période succédèrent les administrations de don Manuel Montt, le premier des présidents civils. Pendant ses deux présidences (1851-1861), l'ordre fut maintenu avec fermeté, le code civil fut complété et sanctionné, l'instruction primaire et gratuite fut élargie; une nouvelle organisation fut donnée au service des postes; les travaux de chemins de fer furent commencés et favorisés; des lignes télégraphiques furent établies. 

Ce gouvernement pratiquait un libéralisme encourageant et ouvrait l'accès du pays aux capitaux et aux bras étrangers. Il encouragea la colonisation allemande dans le sud du pays. Pendant les deux périodes gouvernementales de don José Joaquin Perez (1861-1871), la voirie fut améliorée et l'organisation des télégraphes perfectionnée; la tolérance religieuse, qui dominait dans les coutumes, fut consacrée par les lois. En 1865 eut lieu un conflit avec l'Espagne, mais ce ne fut qu'une guerre fort courte, marquée seulement par la capture d'un vaisseau de l'escadre espagnole et par le bombardement du port non fortifié de Valparaiso (31 mars 1866). La paix fut rétablie en 1883. L'administration de don Federico Errazuriz (1871-1876) ouvrit un champ plus large au pouvoir exécutif; la réélection du président fut interdite par la constitution; le réseau des voies ferrées et les communications télégraphiques s'étendirent, la marine militaire fut réorganisée et accrue.

Sous l'administration de don Anibal Pinto, le développement matériel du Chili fut entravé par une grave crise économique. Le congrès fut obligé de réduire de 21 à 16 millions le budget des dépenses publiques. Heureusement le succès de l'exploitation des gisements salpêtriers et miniers découverts en 1876 au Nord de la province d'Atacama fournit de nouvelles ressources au trésor. En avril 1879, le président don Anibal Pinto dut, après avoir occupé le port de Antofagasta, déclarer la guerre aux républiques alliées du Pérou et de la Bolivie; cette guerre, soutenue par le sentiment national, se termina par la prise de Lima (17 janvier 1881) et par la conquête de la partie sud du territoire ennemi. 

Sous le gouvernement de don Domingo Santa Maria l'institution du mariage civil et des registres de l'état civil, et le régime des cimetières publics furent conçus dans un esprit d'égalité; les différends avec la République argentine furent aplanis par la ratification du traité de frontière du 26 octobre 1881; la paix avec l'Espagne et avec le Pérou fut rétablie par les traités du 21 mai 1884; avec la Bolivie par la trêve indéfinie du 29 novembre 1884. 

Sous l'administration de don José Manuel Balmaceda, inaugurée le 18 septembre 1886, la République a continué à jouir de la tranquillité intérieure et d'une entente amicale avec les pays étrangers. La conversion de la Dette extérieure a été faite dans des conditions très avantageuses pour le crédit de la République; la colonisation a reçu un essor, tandis que l'enseignement s'est amélioré et développé grâce à la construction d'un grand nombre d'écoles. Des contrats se montant à la somme de 3 517 000 livres sterling ont été passés avec le représentant d'un syndicat nord-américain pour la construction de 969 kilomètres de lignes de chemin de fer; la canalisation de la rivière Mapocho, qui traverse la capitale, et la construction d'un institut exclusivement destiné aux élèves internes ont été commencés; la garde nationale a été réorganisée; une nouvelle cour de justice a été instituée à Talca; des juges ont été nommés dans les départements qui n'en possédaient pas; des écoles professionnelles de jeunes filles ont été fondées et le Chili a adhéré à la convention postale universelle de Lisbonne.

Le président Balmaceda, élu en 1886, était, en 1891, au terme de son mandat, quand le Congrès prit ombrage d'un candidat présenté par lui pour la présidence et fomenta une révolution; elle dura sept mois et se termina par la victoire des congressistes sur les troupes balmacédistes. Le Congrès nomma alors président l'amiral Jorge Montt  ( le 18 septembre 1896). Des difficultés de frontières, entre le Chili et la république Argentine, auxquelles des traités de 1881 et 1893 n'avaient pas mis fin, furent soumises en 1898 à l'arbitrage de la reine d'Angleterre, et un arrangement intervint aussi en 1898, le 16 avril, entre le Pérou et le Chili, relativement aux territoires litigieux de Tacna et Arica. 

Jorge Montt arriva à l'expiration de ses pouvoirs, sans que des incidents graves aient marqué sa présidence. Son successeur, Frederico Errazuriz, fils d'un ancien président, n'arriva à la présidence qu'à une faible majorité; le fractionnement des partis rendit le gouvernement très instable, et de nombreux ministères se succédèrent. Le 18 septembre 1901, le peuple confia le pouvoir exécutif à German Riesco, beau-frère d'Errazuriz, qui, en suivant une politique pacifique, évita des conflits avec le Pérou et l'Argentine. Riesco était remplacé à la présidence, en 1906, par Pedro Montt. Une sentence arbitrale, rendue le 25 novembre 1902 par le roi d'Angleterre Edouard VII, mit fin à la difficulté qui divisait le Chili et la république Argentine au sujet de la frontière des Andes; l'arbitre traça une frontière arbitraire entre le principal relief de la Cordillère des Andes et la ligne de partage des eaux continentales, donnant ainsi, pour partie, satisfaction aux revendications des deux pays, sans reconnaître le bien-fondé des unes ni des autres.

La partie centrale du Chili a été victime, en août 1906, d'une terrible catastrophe séismique, sans précédent dans cette région pourtant à maintes reprises éprouvée par les tremblements de terre. Le 16 août, dans l'après-midi, une série de secousses, orientées de l'Est à l'Ouest, ont détruit presque complètement Valparaiso - notamment la partie basse de la ville, aux environs du port, où se produisit un terrible raz de marée - et fortement endommagé Santiago, Talca, etc.

Entre 1891 et 1973, une série de gouvernements élus se sont succédés. En 1970, l'arrivé au pouvoir de Salvador Allende et de son gouvernement de gauche a le malheur de déplaire aux Etats-Unis et aux grands propriétaires et industriels chiliens. Il est renversé en 1973 par un coup d'État militaire dirigé par le général Augusto Pinochet et soutenu par la CIA. Cette dictature durera jusqu'à jusqu'à l'investiture d'un président démocratiquement élu, en 1990.

Les réformes économiques, maintenues de manière constante depuis cette époque, ont contribué à une croissance régulière, réduit les taux de pauvreté de plus de moitié et aidé à garantir l'engagement du pays envers un gouvernement démocratique et représentatif. Le Chili assume de plus en plus des rôles de leadership régional et international dignes de son statut de nation stable et démocratique. (GE / NLI).



Pierre Kalfon, Chroniques chiliennes, Demopolis, 2008. - Ces Chroniques chiliennes commencent avant l’élection du socialiste Allende, traversent dix-sept ans de dictature du général Pinochet et se prolongent jusqu’à nos jours. Correspondant à Santiago du journal Le Monde, Pierre Kalfon a vécu le meilleur et le pire, de sa rencontre avec Pablo Neruda au choc de son arrestation par les militaires. Il raconte de «petites histoires» qui éclairent la grande, restitue un climat, une géographie, les «choses vues» d’un pays passionnant vers lequel ont convergé les regards de la planète. (couv.).
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