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![]() Aperçu | Lorsque l'on considère par un temps calme et serein des objets éloignés, ou l'ombre que des arbres projettent sur une surface échauffée par le Soleil, on voit que leurs contours oscillent continuellement. Ces ondes de chaleurs, qui déforment ainsi les images des objets lointains et représentent un inconvénient d'autant plus important pour les observations astronomiques qu'elles sont très communes. Mais il existe des formes extrêmes de ce phénomène plus spectaculaires, lorsque, par exemple, les images des objets lointains ne se contentent plus d'onduler et de se déformer, mais qu'elles se dédoublent ou s'inversent. On verra ainsi, dans une lunette, des morceaux de l'horizon qui semblent se détacher, flotter dans l'air, puis retomber. On commence alors à pouvoir parler de mirage. Le mirage est un phénomène météorologique provenant de la déviation du trajet de la lumière lors de sa traversée de couches d'air de densités différentes, et qui fait apercevoir une image renversée d'objets réels; on aperçoit souvent les mirages en même temps les objets eux-mêmes, de sorte que l'on croit voir ces objets et leurs images dans une nappe d'eau. On parle de mirage supérieur ou inférieur, selon la position de l'image par rapport à l'objet. Le phénomène est depuis longtemps connu et étudié. Gaspard Monge | ||||
![]() Rouages | Le mirage se produit dans les plaines étendues, souvent dans les déserts de sable, lais pas seulement et, en tout cas, lorsque le temps est calme et le sol échauffé par le Soleil. Les plaines de l'Asie et de l'Afrique sont devenues célèbres sous se rapport. Par suite de l'action du Soleil, le sable s'échauffe très fortement, tandis que l'air ne s'échauffe que peu, grâce à son grand pouvoir diathermane. Seule la couche d'air située au voisinage du sable s'échauffe par contact. L'air se trouve donc formé de couches, inégalement échauffées, inégalement denses, avant par conséquent des indices de réfraction différents. Aux couches les plus basses, qui sont les plus légères et qui par suite ne restent dans cette position que par une sorte d'équilibre instable, correspondent les indices de réfraction les plus faibles. ![]() - Les phénomènes du mirage ne s'observent dans ces conditions que dans des pays très plats sur une vaste étendue; mais on peut l'observer beaucoup plus souvent qu'on ne le croit, surtout quand on approche la tête de la surface du sol dans des plaines moins vastes. « J'ai observé [ce phénomène], dit par exemple KaemtzC'est ainsi également que l'on peut apercevoir assez souvent des phénomènes de mirage dans les plaines de la Crau ![]() Tous ces phénomènes, qu'on peut expliquer de la même façon par l'existence de couches d'air parallèles, inégalement dilatées, exigent évidemment pour se produire que l'air soit absolument calme. | ||||
![]() Collection | Les mirages d'Égypte. L'expédition d'Égypte n'a pas seulement été l'occasion de découvrir l'explication des mirages, elle a également fait en Europe toute la célébrité du phénomène. Pendant cette entreprise, l'armée française éprouva en effet souvent de cruelles déceptions qui ne furent pas toutes militaires. Le baron Larrey ![]() « Des plaines aqueuses semblaient nous offrir le terme de nos maux, mais ce n'était que pour nous replonger dans une plus grande tristesse, d'où résultaient l'abattement et la prostration de nos forces, qui s'est portée chez plusieurs de nos braves, au dernier degré. Appelé trop tard pour quelques uns d'entre eux, mes secours devenaient inutiles, et ils périssaient comme par extinction : cette mort me parut douce et calme, car l'un d'eux me disait, au dernier instant de sa vie, se trouver dans un bien-être inexprimable, cependant j'en ai ranimé un assez grand nombre avec un peu d'eau douce aiguisée de quelques gouttes d'esprit-de-vin que je portais constamment avec moi dans une petite outre en cuir. »Le sol de la Haute Égypte forme une plaine parfaitement horizontale; les villages sont situés sur de petites éminences. Le matin et le soir, ils paraissent dans leur situation et leur distance réelle, mais quand le sol est fortement échauffé le pays ressemble à un lac, et les villages paraissent bâtis sur des îles et se reflètent dans l'eau. Quand on approche disparaît et le voyageur dévoré par la soif est trompé dans son espoir. Ce phénomène est si commun dans ces contrées, que le Coran ![]() « Les actions de l'incrédule sont semblables au serab de la plaine; celui qui a soif le prend pour de l'eau jusqu'à ce qu'il s'en approche, et trouve que ce n'est rien. » ![]() Un mirage dans le désert : image extraite de The Aerial World, de G. Hartwig (Londres, 1886). (Source : NOAA Photo Library). Les mirages des pays froids. Si le sol est plus froid que l'air qui est en contact avec lui, alors la température des couches aériennes croît rapidement avec la hauteur, et on voit non seulement au-dessus de l'objet son image renversée, mais le cercle visuel du spectateur est singulièrement agrandi. Sur la côte septentrionale de l'Allemagne, où ce type de mirage est commun, on parle de Kimmung. La même situation peut également s'observer en mer. Les navigateurs observent des mirages dans des circonstances similaires. La température de la mer, plus froide que cille des couches calmes superposées, rend leur densité décroissante de bas en haut et l'image renversée des cites ou des navires éloignés se dessine sur l'atmosphère. Le capitaine Scoresby ![]() « Le 19 juin 1822, dit ce marin dans une de ses relations, le soleil était très chaud, et la côté parut subitement rapprochée de 25 à 35 kilomètres; les différentes éminences étaient tellement relevées, que du pont du navire on les voyait aussi bien qu'auparavant de la hune de misaine. La glace à l'horizon prenait des formes singulières; de gros blocs figuraient des colonnes; des glaçons et des champs de glace ressemblaient à une chaîne de rochers prismatiques; sur beaucoup de points la glace parut en l'air à une assez grande distance au-dessus de l'horizon. Les navires qui se trouvaient dans le voisinage avaient les aspects, les plus bizarres; dans quelques-uns la grande voile semblait réduite à rien, tandis que la voile de misaine paraissait quatre fois plus grande qu'elle ne l'est; les huniers semblaient rapetissés. Au-dessus des navires éloignés on voyait leur propre image renversée et agrandie; dans quelques cas elle était assez élevée au-dessus du navire, mais alors elle était toujours plus petite que l'original. On vit, pendant quelques minutes, l'image d'un navire qui lui-même était au-dessous de l'horizon. Un navire était même surmonté de deux navires, l'un droit, l'autre renversé. »Quelques jours plus tard Scoresby vit les mêmes apparences : « Le phénomène le plus curieux, continue-t-il, c'était de voir l'image renversée et parfaitement nette d'un navire qui se trouvait au-dessous de notre horizon. Nous avions observé des apparences semblables, mais ce qu'il y avait de particulier dans celle-ci, c'était la netteté de l'image et le grand éloignement du navire qu'elle représentait. Ses contours étaient si bien marqués, qu'en regardant cette image à travers une lunette de DollondLe mirage latéral. Parmi les variétés, du phénomène, celle que Soret et Jurine ont observée sur le lac de Genève et qu'on doit appeler mirage latéral, n'est pas la moins curieuse. Ils se trouvaient au deuxième étage d'une maison située sur le rivage et regardaient avec une longue-vue plusieurs barques à la voile qui se dirigeaient de droite à gauche vers le milieu du lac, pendant que près de la côte ce même groupe de barques, paraissait faire route de gauche, à droite. C'était une illusion analogue au mirage égyptien et qu'on explique de la même manière. Sur la côte, l'air était resté dans l'ombre une partie de la matinée, tandis qu'au large il avait été échauffé par le Soleil; de là, dans l'atmosphère, des couches verticales de densités décroissantes demeurées immobiles pendant le calme. La Fata Morgana. « Sur une étendue de plusieurs lieues, dit un témoin de ce spectacle extraordinaire, je vis la mer des côtes de Sicile prendre l'apparence d'une chaîne de montagnes sombres, tandis que les eaux, du coté de la Calabre ![]() La Fata Morgana sur le détroit de Messine, d'après une estampe de Guglielmo Fortuyn (1773). Source : Parco Ecologico San Jachiddu. Et d'autres encore... « On pouvait voir les côtes de France, de puis CalaisBernardin de Saint-Pierre (1737-1814) rapporte le fait suivant : « Un phénomène très singulier m'a été raconté par notre célèbre peintre Vernet, mon ami. Étant, dans sa jeunesse, en Italie, il se livrait particulièrement à l'étude du ciel, plus intéressante sans doute que celle de l'antique, puisque c'est des sources de la lumière que partent les couleurs et les perspectives aériennes qui font le charme des tableaux ainsi que de la nature. Vernet, pour fixer les variations, avait imaginé de peindre sur les feuilles d'un livre toutes les nuances de chaque couleur principale et de les marquer de différents numéros. Lorsqu'il dessinait un ciel, après avoir esquissé les plans et la forme des nuages, il en notait rapidement les teintes fugitives sur son tableau avec des chiffres correspondants à ceux de son livre, et il les colorait ensuite à loisir. Un jour, il fut bien surpris "d'apercevoir au ciel la forme d'une ville renversée; il en distinguait parfaitement les clochersC'est peut-être à des effets de mirage qu'il faut rapporter une faculté extraordinaire de vision, célèbre à la Réunion. Vers la fin du XVIIIe siècle, un colon de cette île, Bottineau, signalait des navires placés bien au delà des limites de l'horizon, jusqu'à une distance considérable. La science nouvelle qu'il prétendait avoir constituée en combinant les effets produits par les objets éloignés sur l'atmosphère et sur l'eau, était nommée par lui la Nauscopie. Il vint à Paris, muni de certificats de l'intendant et du gouverneur de l'île de France attestant la réalité de sa découverte; mais il ne réussit même pas à obtenir une audience de de Castries, alors ministre de la marine. Personne ne s'enquit des moyens par lesquels il obtenait de si étonnants résultats, auxquels un juge compétent, François Arago ![]() -
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