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Génération des métaux

Génération des métaux (alchimie, histoire des sciences). - D'après Aristote, les
métaux sont formés d'eau et de terre : ce qui exprime leur fusibilité et leur fixité, aussi bien que leur aptitude à être changés en oxydes. Aristote distingue encore les corps en réceptifs on passifs, et actifs ou donnant la forme. C'est ainsi que l'étain disparaît en subissant l'influence de la matière du cuivre qui le colore. Nous touchons ici aux notions alchimiques. Il indique également qu'il existe dans la terre deux vapeurs ou exhalaisons, l'exhalaison sèche et l'exhalaison humide, laquelle produit les métaux. Ces énoncés rappellent, sous une forme plus vague, les théories forgées au XIXe siècle sur les minéraux de filons, produits par les vapeurs souterraines. Et ailleurs :
« L'or, l'argent, le cuivre, l'étain, le plomb, le verre et bien des pierres sans nom, participent de l'eau : car tous ces corps fondent par là chaleur. Divers vins, l'urine, le vinaigre, la lessive, le petit-lait, la lymphe participent aussi de l'eau, car tous ces corps sont solidifiés par le froid. Le fer, la corne, les ongles, les tendons, le bois, les cheveux, les feuilles, l'écorce participent plutôt de la terre : ainsi que l'ambre, la myrrhe, l'encens, etc. » 
Tous ces énoncés témoignent de l'effort fait par la science antique pour pénétrer la constitution des corps, et manifestent les analogies vagues qui guidaient ses conceptions. La théorie des exhalaisons est le point de départ des idées ultérieures sur la génération des métaux dans la terre; nous lisons dans Proclus, philosophe néoplatonicien.
« L'or et l'argent et chacun des métaux, dit-il, sont engendrés dans la terre sous l'influence des divinités célestes et de leurs effluves. Le soleil produit l'or; la lune, l'argent; Saturne, le plomb; Mars, le fer. »
D'autres ont ajouté depuis : Vénus produit le cuivre; Mercure (ou Jupiter), l'étain. Ces théories ont régné pendant le Moyen âge. On lit encore, dans Vincent de Beauvais
« D'après Rhazès, les minéraux sont des vapeurs épaissies et coagulées au bout d'un temps considérable. Le vif argent et le soufre se condensent d'abord. Les corps transformés graduellement pendant des milliers d'années dans les mines arrivent à l'état d'or et d'argent; mais l'art peut produire ces effets en un seul jour. » 
Dès les temps les plus anciens, ces idées se sont mêlées avec des imaginations astrologiques, relatives aux influences sidérales. 
« Les métaux et les pierres, disait-on, n'éprouvent pas les influences célestes, sous leur forme même de métaux ou de pierres, mais lorsqu'ils sont sous la forme de vapeurs et tandis qu'ils durcissent. »
On voit par là le sens mystique de ces mots attribués à Hermès par Albert le Grand
« La terre est la mère des métaux ; le ciel en est le père. » 
De même cet autre axiome hermétique :
« En haut les choses terrestres; en bas les choses célestes », 
lequel s'appliquait à la fois à la transformation des vapeurs dans la nature et à la métamorphose analogue que l'on effectuait par l'art dans les alambics.

Avicenne, après avoir décrit le détail supposé de cette création des métaux, ajoute :

« Cependant il est douteux que la transmutation effective soit possible. Si l'on a donné au plomb purifié les qualités de l'argent (chaleur, saveur, densité), de façon que les hommes s'y trompent, la différence spécifique ne peut être enlevée, parce que l'art est plus faible que la nature. »
Albert le Grand dit de même :
« Ceux qui blanchissent par des teintures blanches etjaunissent par des teintures jaunes, sans que l'espèce matérielle soit changée, sont des trompeurs et ne font ni vrai or ni vrai argent. »


Les théories mêmes des anciens avaient une portée plus grande et plus profonde. Les uns regardaient toutes choses comme formées par l'association des quatre éléments terre, eau, air et feu. En en changeant la proportion relative, on devait pouvoir fabriquer tous les corps, et cette doctrine vague a régné jusqu'au temps de Lavoisier. Le support commun de ces éléments était constitué par la matière première, existant en soi, mais déterminée seulement par les qualités spécifiques des substances individuelles. C'étaient là les idées des platoniciens et des aristotéliciens. Les premiers alchimistes grecs les avaient précisées davantage, en admettant que les métaux en particulier procèdent d'une matière première identique, qui est le mercure des philosophes, substance analogue au mercure vulgaire, mais plus quintessenciée. Son union avec le soufre constituait les métaux, et cette doctrine, un peu vague chez les Grecs, a été précisée par les Arabes et, à leur suite, par les Latins du Moyen Âge. Suivant la proportion relative de ces deux composants et leur degré inégal de pureté et de cuisson, on pouvait obtenir tous les métaux. On pouvait encore, un métal étant donné, compléter ce qui lui manquait et supprimer ce qu'il avait en trop, de façon à le changer en or on en argent. L'agent qui produisait ces effets opérait à la façon des ferments et il jouait en même temps le rôle de principe tinctorial ; c'était l'élixir ou pierre philosophale. (M. B.).

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Dictionnaire Religions, mythes, symboles
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