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L'Eglise grecque
ou Eglise orientale orthodoxe n'est autre que l'ancienne Eglise
chrétienne d'Orient, séparée définitivement
de l'Eglise romaine, à la suite des anathèmes lancés
par le pape Léon IX contre Michel Cerularius, patriarche de Constantinople
(16 juillet 1054). Elle comprend les débris des anciens patriarchats
de Byzance, d'Antioche, d'Alexandrie et de Jérusalem, longtemps
soumis à la domination turque; et d'elle, comme métropole,
sont issues les églises orthodoxes de Grèce, de Bulgarie,
de Roumanie et de Serbie, de Géorgie et de Russie, ainsi que les
Raitzen, ou Grecs orthodoxes de l'ancienne Autriche-Hongrie.
L'Église grecque nie la suprématie
du pape, le dogme que le Saint-Esprit procède du Père et
du Fils, le Purgatoire, rejette la Confirmation,
consacre l'Eucharistie avec du pain levé, permet d'ordonner prêtres
des clercs mariés, célèbre l'office en langue grecque,
exclut des églises les statues, et
n'admet que les 8 premiers conciles oecuméniques.
Elle est répandue en Grèce ,
dans les îles Ioniennes, en Anatolie ,
en Russie
( L'Eglise
russe). Né en 858, sous le patriarche Photius,
le schisme grec fut consommé en 1053 par le patriarche Cérularius.
Le 2e concile de Lyon,
en 1274, et le concile de Florence en 1439 ont vainement tenté de
mettre un terme à ce schisme.
L'Eglise grecque reconnut longtemps pour
seul chef le patriarche de Constantinople
: les Russes se séparèrent de ce chef en 1588 et eurent d'abord
un patriarche distinct, résidant à Moscou;
à partir de Pierre le Grand, et jusqu'à
la révolution russe de 1917, ils n'ont eut d'autre chef de
leur religion que l'empereur même.
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Le
monastère de saint Varlaam, l'un des monastères des Météores,
en Grèce.
Source
: The World factbook.
Caractères
distinctifs.
Dogmatique.
Aristote avait déjà remarqué
qu'autant l'Oriental se plaît à la " métaphysique,
autant les Occidentaux se plaisent à la morale ». En effet,
ce qui distingue de prime abord l'Eglise orientale de l'Eglise romaine,
c'est une tendance spéculative très forte, le goût
des subtilités dialectiques et des discussions théologiques
: toutes les grandes controverses dogmatiques sont nées chez les
Grecs. Seulement, tandis qu'en Occident l'évolution dogmatique s'est
poursuivie à travers la scolastique du Moyen âge et dure encore,
en Orient la vie des dogmes s'est pour ainsi dire figée à
la fin du VIIe siècle, après la controverse monothélite.
Le symbole de la foi orthodoxe, que professent encore aujourd'hui Grecs
et Russes, fut complètement achevé par le concile de Nicée
et par le premier concile de Constantinople. De là, dans la doctrine
des chrétiens d'Orient quelque chose de plus antique et de plus
stable que dans celle des Latins et qui la rapproche des temps apostoliques.
C'est ainsi que les Grecs orthodoxes admettent que le Saint-Esprit procède,
par un acte éternel, du Père (a Patre), seul principe de
la Trinité, mais rejettent le Filioque ajouté au Credo des
Latins par le synode de Tolède (589). De même, ils adorent
la vierge Marie, en qualité de mère de Dieu (theotokos),
vierge avant, pendant et après la naissance du Christ, mais rejettent
le dogme de l'immaculée conception; ils enseignent que l'humain
doit concourir à son salut par les bonnes oeuvres, mais nient les
mérites surérogatoires des saints, et par suite les indulgences.
Enfin, ils croient qu'en attendant le jugement dernier, les âmes
qui n'ont pas encouru, à la mort, la damnation, demeurent dans une
sorte de stage d'épreuves où nous pouvons leur venir en aide
par nos prières, nos bonnes oeuvres et la célébration
de l'eucharistie, mais ils repoussent le purgatoire et la prédestination.
Discipline
et organisation.
En fait d'organisation et de discipline,
l'Eglise orientale ne diffère pas moins de l'Eglise romaine. Dans
celle-ci, le gouvernement a revêtu la forme d'une monarchie absolue
depuis que l'évêque de Rome a été déclaré
supérieur au concile général, autocrate et infaillible.
Chez les Grecs, au contraire, l'autorité suprême réside
toujours dans le concile oecuménique; chaque évêque
prend part au gouvernement général de l'Eglise; chaque Eglise
nationale est autocéphale, c.-à-d. se gouverne elle-même
par le moyen de ses évêques et d'un exarque ou d'un métropolitain,
réunis en concile. A la tête de l'Eglise orientale, au lieu
d'un pape unique et infaillible, se trouvent les quatre patriarches de
Constantinople / Istanbul, d'Antioche, d'Alexandrie et de Jérusalem,
qui ont conservé chacun sa juridiction et qui, réunis en
synode, sous la présidence du premier, décident en dernier
ressort toutes les affaires d'intérêt général
et de justice.
la discipline de l'Eglise grecque a aussi
un caractère plus paternel; elle est plus semblable à celle
des apôtres, sauf sur l'article des jeûnes, qui sont plus rigoureux
que chez les Latins. Le mariage est autorisé et même général
dans le clergé séculier, mais les deuxièmes noces
sont interdites; les moines d'Orient, soumis à la règle de
Saint-Basile, ont conservé le caractère laïque et les
allures indépendantes qu'ils avaient dans les premiers temps : ce
sont les caloyers; la minorité seule reçoit l'ordination,
d'où le nom de hiéronomaques; c'est parmi ces derniers que
se recrutent les évêques et les archimandrites. Les Grecs
reconnaissent quatre-vingt-cinq canons disciplinaires, proclamés
apostoliques par le concile in Trullo, dit Quinisexte, tandis que les Latins
n'en admettent que cinquante.
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Une
chapelle grecque, à Wiesbaden (Allemagne).
Liturgie
et rites du culte.
Les Grecs sont encore plus conservateurs
en fait de rites qu'en matière de dogmes. Leur liturgie, comme dans
l'Eglise des premiers siècles, se divise en trois parties : liturgie
préparatoire, liturgie des catéchumènes,
liturgie des fidèles, et renferme beaucoup de formules de prières
et des hymnes qui remontent à saint Basile, à saint Jean
Chrysostome et plus haut encore. La liturgie, ainsi que la lecture de la
Bible, doit être dite à haute voix et dans une langue intelligible
de tous, c. -à-d. en langue nationale. Les fidèles, à
l'église, se tiennent debout, sauf à la Pentecôte,
où l'on s'agenouille; les hommes sont séparés des
femmes par un treillis, et la musique instrumentale est interdite. Quant
aux sacrements, ils en ont sept comme les Latins, mais les administrent
suivant des rites sensiblement différents. C'est ainsi qu'ils donnent
le baptême par triple immersion et, aussitôt après,
la confirmation. Ils célèbrent l'eucharistie, dans laquelle
ils voient d'ailleurs une transsubstantiation, sous les deux espèces,
se servent de pain avec levain (prosphores), la distribuent aux enfants;
donc plus de catéchumènes ni de première communion.
C'est seulement sur le chapitre des fêtes et des images que les Orientaux
se sont montrés novateurs : ils ont ajouté aux grandes fêtes
fondamentales une quantité de fêtes en l'honneur de la Vierge
et des saints; tout en proscrivant les représentations en relief
des saints (sculptures ou bas-reliefs), ils vénèrent les
images peintes et célèbrent une grande fête : la Panégyrie
de l'Orthodoxie en l'honneur du triomphe du culte des images au septième
concile général, à Nicée (787). Enfin, par
suite du déclin des études théologiques dans le clergé
et de la vie religieuse chez les laïques, la grande masse des chrétiens
orthodoxes en est venue à attacher aux formules liturgiques et aux
gestes de l'officiant une importance telle que la foi dégénère
souvent en croyance magique et l'adora tion en ritualisme machinal.
Historique.
L'histoire de l'Église grecque
pendant les huit premiers siècles peut se ramener à celle
des grands conciles oecuméniques, qui se tinrent sans exception
en Orient. Il faut seulement signaler ici le fait que, outre les sept conciles
généraux reconnus par les Latins jusqu'à 787, les
Grecs admettent l'autorité du concile in Trullo dit Quinisexte,
réuni par Justinien II pour compléter l'oeuvre des cinquième
et sixième oecuméniques tenus à Constantinople et
qui avaient négligé d'édicter la discipline. Ces conciles
eurent d'ailleurs pour effet de démembrer successivement le grand
corps de l'Eglise d'Orient, en produisant une série de schismes.
Ainsi, le concile de Nicée fut suivi du schisme des ariens, celui
d'Ephèse et de Chalcédoine causèrent l'émigration
des nestoriens et des Arméniens (451). Enfin, le schisme des monophysites
(ou jacobites), celui des monothélètes et celui des iconoclastes
furent déterminés par les décrets des deuxième
(553) et troisième (660) conciles de Constantinople et par le deuxième
concile de Nicée (787). Tandis que l'Eglise orientale se déchirait
ainsi de ses propres mains, les Arabes accouraient à cheval, animés
par une foi nouvelle et ardente, et, levant l'étendard vert da prophète
Mohammed, ils lui arrachaient ses plus belles provinces, celles qui avaient
été le berceau même de l'Eglise : la Syrie et la Palestine
(635-638); l'Egypte (638-649), Rhodes et Chypre et, traversant toute l'Asie
Mineure, ils s'avançaient jusqu'à Byzance (668-718). Cependant
l'Europe chrétienne, indignée de
voir le-Saint-Sépulcre aux mains
des infidèles, se levait, à la voix de Pierre l'Ermite et
de saint Bernard, et, organisant les croisades, se ruait contre l'Orient.
Mais le patriarche de Constantinople, au lieu se se prêéter
à un accommodement, rompit irrévocablement avec Rome (1054),
et les croisés latins, au lieu de venir en aide aux Eglises grecques,
exploitaient les églises ou les couvents byzantins, persécutaient
le clergé orthodoxe et finissaient même par s'emparer de Constantinople
et y fonder l'empire latin (1024-1261). Les croisades n'eurent pour effet
que de suspendre pendant deux siècles l'invasion des Turcs Seldjoukides.
En 1326, ils reprirent de plus belle leur marche en avant, envahirent la
Macédoine
et la Thrace (prise d'Andrinople : 1361), achevèrent la conquête
de l'Asie Mineure, de la Bosnie et de la Serbie, et, enfin, les Ottomans
prirent Constantinople (1453). A partir de cette époque, l'Eglise
grecque d'Orient a végété sous la domination ottomane,
conservant certains privilèges, mais soumise jusqu'au premières
décennies du XXe siècle,
à tous les caprices du sultan.
Or, tandis que le tronc même de
l'Eglise orientale était sapé par les coups de l'Islam, les
missionnaires byzantins convertissaient au christianisme un certain nombre
populations, qui allaient former comme de vigoureux rejetons. C'est ainsi
que se dressèrent les Eglises de Géorgie (ou Ibérie,
332), de Bulgarie et de Serbie (IXe siècle), de Russie (988). D'autre
part, dans notre siècle, l'affranchissement de quelques nations
du joug ottoman a amené la constitution d'Eglises orthodoxes autocéphales
telles que : l'Eglise hellénique (1833); l'Eglise roumaine, l'Eglise
du Montenegro; l'Eglise bulgare (1870); cette dernière a été
déclarée schismatique par le synode de Constantinople en
1872.
D'autre part, les papes ont réussi
à rallier à l'Eglise romaine quelques branches de l'Eglise
orientale; par exemple les Maronites (1182 et 1445), les Grecs-Unis de
la Russie blanche (Biélorussie) et de la Lituanie (1596) et les
Arméniens-Unis (fin du XVIIe siècle)
qui possèdent le couvent célèbre fondé par
Mekhitar à Venise (1717). (G. Bonet-Maury).
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William
Dalrymple, Dans
l'ombre de Byzance, Noir sur blanc, 2006. - En
1994, William Dalrymple part sur les traces d’un moine de mille quatre
cents ans son aîné, qui avait entrepris, au VIe siècle,
un périple à travers l’empire byzantin, des rives du Bosphore
aux déserts égyptiens. La chronique de ce voyage, un texte
intitulé « Pré spirituel », va servir de guide
à notre auteur dans ses pérégrinations. Parti du Mont
Athos, Dalrymple traverse la Turquie, puis se rend en Syrie, au Liban,
en Israël puis enfin en Egypte. Dans ses errances, il poursuit non
seulement une quête personnelle, mais mène aussi une recherche
sur le destin des Chrétiens en Orient. Séjournant aussi bien
dans des lieux de recueillement, églises et monastères, que
dans des villes aux tentations plus terrestres comme Alexandrie et Constantinople,
ou encore Beyrouth ou Jérusalem, déjà théâtres
de violences. Il porte un regard non seulement de savant et d’érudit,
mais aussi de journaliste et d’historien sur des régions souvent
traversées par des conflits millénaires. C’est un livre humaniste
et sensible. Dalrymple relate ses rencontres avec maintes personnes croisées
au cours de ses voyages : du plus simple paysan au prince le plus capricieux.
Il sait, souvent avec humour, toujours avec finesse, faire entendre leurs
voix et faire sentir la justesse de leurs témoignages. Chez lui,
une ironie bien britannique côtoie le pathos de certaines situations.
Joint à sa soif de connaissances est son talent de conteur, et le
livre qui en résulte est riche en enseignements. (couv.). |
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